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Jean-Pierre Claris de Florian



Le savant et le fermier - Fable


Fable / Poémes d'Jean-Pierre Claris de Florian





Que j'aime les héros dont je conte l'histoire !



Et qu'à m'occuper d'eux je trouve de douceur !



J'ignore s'ils pourront m'acquérir de la gloire ;



Mais je sais qu'ils font mon bonheur.



Avec les animaux je veux passer ma vie ;



Ils sont si bonne compagnie !



Je conviens cependant, et c'est avec douleur,



Que tous n'ont pas le même cour.



Plusieurs que l'on connaît, sans qu'ici je les nomme,



De nos vices ont bonne part :



Mais je les trouve encor moins dangereux que l'homme ;



Et fripon pour fripon je préfère un renard.



C'est ainsi que pensait un sage,



Un bon fermier de mon pays.



Depuis quatre-vingts ans, de tout le voisinage



On venait écouter et suivre ses avis.



Chaque mot qu'il disait était une sentence.



Son exemple surtout aidait son éloquence ;



Et lorsqu'environné de ses quarante enfants,



Fils, petits-fils, brus, gendres, filles,



Il jugeait les procès ou réglait les familles,



Nul n'eût osé mentir devant ses cheveux blancs.



Je me souviens qu'un jour dans son champêtre asile



Il vint un savant de la ville



Qui dit au bon vieillard : mon père, enseignez-moi



Dans quel auteur, dans quel ouvrage,



Vous apprîtes l'art d'être sage.



Chez quelle nation, à la cour de quel roi,



Avez-vous été, comme
Ulysse,



Prendre des leçons de justice ?



Suivez-vous de
Zénon la rigoureuse loi ?



Avez-vous embrassé la secte d'Épicure,



Celle de
Pythagore ou du divin
Platon ?



De tous ces messieurs-là je ne sais pas le nom,



Répondit le vieillard : mon livre est la nature ;



Et mon unique précepteur,



C'est mon cour.



Je vois les animaux, j'y trouve le modèle



Des vertus que je dois chérir :



La colombe m'apprit à devenir fidèle ;



En voyant la fourmi j'amassai pour jouir ;



Mes boufs m'enseignent la constance,



Mes brebis la douceur, mes chiens la vigilance ;



Et si j'avais besoin d'avis



Pour aimer mes filles, mes fils,



La poule et ses poussins me serviraient d'exemple.



Ainsi dans l'univers tout ce que je contemple



M'avertit d'un devoir qu'il m'est doux de remplir.



Je fais souvent du bien pour avoir du plaisir,



J'aime et je suis aimé, mon âme est tendre et pure,



Et toujours selon ma mesure



Ma raison sait régler mes voux :



J'observe et je suis la nature,



C'est mon secret pour être heureux.



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Jean-Pierre Claris de Florian
(1755 - 1794)
 
  Jean-Pierre Claris de Florian - Portrait  
 
Portrait de Jean-Pierre Claris de Florian

Biographie / Ouvres

Jean-Pierre Claris de Florian est né à Florian près de Sauve, dans les Cévennes, le 6 mars 1755, perd sa mère très jeune, probablement à l'âge de deux ans.
Familier du château de Sceaux et protégé de Voltaire (son oncle). Lauréat de l'Académie, le 6 mars 1788, Florian atteignit le sommet de sa gloire en y entrant , remplaçant le cardinal de Luynes.
Banni de Paris pendant

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