Jules Supervielle |
Depuis dix ans ils avaient vécu à vingt lieues d'un sourire de femme, leurs yeux ne s'étaient allumés à d'autres yeux, leurs mains ne s'étaient rejointes autour d'un corps, ils tombaient épuisés par les dures chevauchées derrière le bétail au galop de bois, n'ayant pour compagnons que les moutons monotones, les vaches vagissantes, et des chevaux exténués par une sécheresse de sept mois. Vint une métisse énorme et jaune dont les lèvres s'effaçaient et renaissaient en sourires, dont les regards s'échappaient au loin accouraient en toute hâte puérile. Son ventre vagabondait doucement sous son large tablier rose-bleu, son col fléchissait comme celui des calandres et les gauchos confondaient son corps aux cuisses obèses, avec les frêles adolescentes dansant sur la couverture coloriée des almanachs de la Capitale. Comme Indalecia se donnait à tous ses promesses formaient sur les murs du rancho une frise de grappes douces et le vieil accordéon pourri donnait de nouveau, la nuit ' l'aigre grêle de ses notes qui eussent été fausses sans la métisse qui les refaisait à l'image de son sourire, parmi la fumée du foyer et les étincelles. |
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Jules Supervielle (1884 - 1960) |
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Portrait de Jules Supervielle | |||||||||
Biographie / OuvresSes parents, français, se sont expatriés en Uruguay pour fonder une banque. De retour en France pour des vacances, l'année même de la naissance de Jules, il meurent tous les deux : il devait y avoir quelque chose dans l'eau du robinet. C'est son oncle et sa tante qui l'élèvent et qui s'occupent de la banque en Uruguay. Ce n'est qu'à l'âge de 9 ans qu'il apprend qu'il est adopté. ChronologieDe 1880 à 1883 : Bernard, oncle du poète, fonde en Uruguay une banque avec sa femme Marie-Anne. Cette entreprise devient rapidement familiale : Bernard demande à son frère Jules, père du poète, de venir le rejoindre en Uruguay. Jules fait du trio un parfait quatuor en épousant sa propre belle-soeur, Marie, soeur de Marie-Anne et mère du poète. |
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