Jules Supervielle |
Vagues se dressant pour construire, Et qui retombent sans pouvoir Donner forme à leur vieil espoir Sous l'eau qui d'elles se retire, Je frôlais un jour un village Naufragé au fil de vos eaux Qui venaient humer d'âge en âge Les maisons de face et de dos, Village sans rues ni clocher, Sans drapeau, ni linge à sécher, Et tout entier si plein de songe Que l'on eût dit le front d'une ombre. Des maisons à queue de poisson Formaient ce village-sirène Où le lierre et le liseron S'épuisaient en volutes vaines. Parfois une étoile inquiète Violente au grand jour approchait, Et plus violente s'en allait Dans sa chevelure défaite. Un écolier taché d'embruns Portant sous le bras un cartable Jetait un regard outrebrun Sur les hautes vagues de fable, Un enfant de l'éternité, Cher aux solitudes célestes Plein d'écume et de vérité ■Un clair enfant long et modeste, Dans ce village sans tombeaux, Sans ramages ni pâturages Donnant de tous côtés sur l'eau, Village où l'âme faisait rage, Et qui, ramassé sur la mer, Attendait une grande voile Pour voguer enfin vers la terre Où fument de calmes villages. |
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Jules Supervielle (1884 - 1960) |
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Portrait de Jules Supervielle | |||||||||
Biographie / OuvresSes parents, français, se sont expatriés en Uruguay pour fonder une banque. De retour en France pour des vacances, l'année même de la naissance de Jules, il meurent tous les deux : il devait y avoir quelque chose dans l'eau du robinet. C'est son oncle et sa tante qui l'élèvent et qui s'occupent de la banque en Uruguay. Ce n'est qu'à l'âge de 9 ans qu'il apprend qu'il est adopté. ChronologieDe 1880 à 1883 : Bernard, oncle du poète, fonde en Uruguay une banque avec sa femme Marie-Anne. Cette entreprise devient rapidement familiale : Bernard demande à son frère Jules, père du poète, de venir le rejoindre en Uruguay. Jules fait du trio un parfait quatuor en épousant sa propre belle-soeur, Marie, soeur de Marie-Anne et mère du poète. |
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