Jules Supervielle |
Mon âme donne sur la cour Où quelques canaris pépient, Une bonne dans l'ombre pie Repasse ses vieilles amours. Le lait du petit jour qu'on monte Propose une âme et de l'espoir Aux anneaux de l'escalier noir Où tintent ses promesses promptes. Ce sont les bruits clairs du matin, Le jour nouveau qui me visitent, Et ni moins vite, ni plus vite Les pas serviles du destin. Ce sont mes jambes de trente ans Qui filent vers la quarantaine, Sans que ni l'amour ni la haine Ne les arrêtent un instant Je retrouve à la même place Mes os d'hier et d'aujourd'hui, Parmi la chair vive et sa nuit Mon cour m'encombre et me grimace. Plus de trente ans je me cherchai Toujours de moi-même empêché, Hier enfin je me vis paraître Debout dans la brousse de l'être; J'étais nu, le cour apparent Avec sa courbe et son tourment. Je donnai à l'autre moi-même (Aussitôt nous nous reconnûmes) Une poignée de main sereine Ayant un petit goût posthume. Il n'y eut pas même une larme, Ce fut grave torride calme, Et je me tendis une palme Que je gardais depuis trente ans Pour ce purissime moment. |
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Jules Supervielle (1884 - 1960) |
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Portrait de Jules Supervielle | |||||||||
Biographie / OuvresSes parents, français, se sont expatriés en Uruguay pour fonder une banque. De retour en France pour des vacances, l'année même de la naissance de Jules, il meurent tous les deux : il devait y avoir quelque chose dans l'eau du robinet. C'est son oncle et sa tante qui l'élèvent et qui s'occupent de la banque en Uruguay. Ce n'est qu'à l'âge de 9 ans qu'il apprend qu'il est adopté. ChronologieDe 1880 à 1883 : Bernard, oncle du poète, fonde en Uruguay une banque avec sa femme Marie-Anne. Cette entreprise devient rapidement familiale : Bernard demande à son frère Jules, père du poète, de venir le rejoindre en Uruguay. Jules fait du trio un parfait quatuor en épousant sa propre belle-soeur, Marie, soeur de Marie-Anne et mère du poète. |
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