Louise Labé |
Que faites vous, mes compagnons, Des chères Muses chers mignons? Av'ous encore en notre absence De votre Magny souvenance? Magny votre compagnon dous, Qui ha souvenance de vous Plus qu'assez, s'une Damoiselle, Sa douce maitresse nouvelle. Qui restreint d'une estroite Foy Le laisse souvenir de soy. Mais le Povret qu'Amour tourmente D'une chaleur trop véhémente, En oubli le Povret ha mis Soymesme et ses meilleurs amis : Et le Povret à rien ne pense. Et si n'a de rien souvenance. Mais seulement il lui souvient De la maitresse qui le tient, Et rien sinon d'elle il ne pense, N'ayant que d'elle souvenance. Et, tout brûlé du feu d'amours Passe ainsi les nuits et les jours. Sous le joug d'une Damoiselle Sa douce maitresse nouvelle, Qui le fait ore esclave sien, Ataché d'un nouveau lien: Qui le cour de ce misérable Brûle d'un feu non secourable. Si le secours soulacieus Ne lui vient de ses mesmes yeus, Qui premiers sa flamme alumerent. Qui premiers son cour enflammèrent. El par qui peut estre adouci L'amoureus feu de son souci. Mais ny le vin ny la viande, Tant soit elle douce et friande, Ne lui peuvent plus agréer. Rien ne pourrait le recréer. Non pas les gentilesses belles De ces gentiles Damoiselles, De qui la demeure Ion met Sur ÎHeliconien sommet ', Qu'il avoit tousjours honorées, Qu'il avoit tousjours adorées Des son jeune aage nouvelet, Encores enfant tendrelet. Adieu donq Nynfes, adieu belles. Adieu gentiles Damoiselles, Adieu le Chour Pegasien , Adieu l'honneur Parnasien Venus la mignarde Déesse, De Paphe la belle Princesse, Et son petit fils Cupidon, Me maitrisent de leur brandon. > Vos chansons n'ont point de puissance De me donner quelque allégeance Aus tourmens qui tiennent mon cour Genné d'une douce langueur Je n'ay que faire de vous, belles: Adieu, gentiles Damoiselles : Car ny pour voir des monceaus d'or Assemblez dedens un trésor, Ny pour voir flofloter le Rone, Ny pour voir escouler la Sone, Ny le gargouillant ruisselet. Qui coulant d'un bruit doucelet. A dormir, d'une douce envie. Sur la fresche rive convie : Ny par les ombreus arbrisseaus Le dous ramage des oiseaus Ny violons, ny espinettes, Ny les gaillardes chansonnettes, Ny au chant des gaies chansons Voir les garces et les garçons Fraper en rond, sans qu'aucun erre. D'un branle mesuré, la terre. Ny tout cela qu'a de joyeus Le renouveau delicieus; Ny de mon cher Givés ' (qui m'ayme Comme ses yeus) le confort mesme. Mon cher Givés, qui comme moy Languit en amoureus émoy, Ne peuvent flater la langueur Qui tient genné mon povre cour : Bien que la mignarde maitresse. Pour qui je languis en détresse, Contre mon amoureus tourment Ne s'endurcisse fièrement : Et bien qu'ingrate ne soit celle, Celle gentile damoiselle Qui fait d'un regard bien humain. Ardre cent feus dedens mon sein. Mais que sert toute la caresse Que je reçoy de ma maitresse ? Et que me vaut passer les jours En telle espérance d'amours. Si les nuiz de mile ennuiz pleines Rendent mes espérances veines ? Et les jours encor plein d'ennuiz, Qu'absent de la belle je suiz, Quand je meurs, absent de la belle. Ou quand je meurs présent près d'elle N'osant montrer (o dur tourment!) Comme je l'ayme ardantement? Celui vraiment est misérable Qu'amour, voire estant favorable. Rend de sa flame langoureus. Chetif quiconque est amoureus. Par qui si cher est estimée Une si légère fumée D'un plaisir suivi de si près De tant d'ennuiz qui sont après. Si ' ay je aussi cher estimée Une si légère fumée. |
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Louise Labé (1524 - 1566) |
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Portrait de Louise Labé | |||||||||
Biographie / chronologiePierre Charly, apprenti cordier (peut-être d'origine italienne), né aux alentours de 1470, illettré au point de ne pas savoir signer, épouse Guillermette Decuchermois, sans doute âgée ; celle-ci est veuve depuis 1489 de Jacques Humbert, dit Labé (ou L'Abbé [forme la plus ancienne], l'Abé, Labbé, Labbyt), cordier installé rue de l'Arbre sec. Pierre reprend le surnom de Labé, qui est attaché au fond BibliographieLouise Labé (ou Labbé) est née à Lyon vers l'année 1524. Son père, Pierre Charly, était un cordelier de la ville. Elle tirera son surnom, la belle cordelière, de son père aussi bien que de son futur époux, Ennemont Perrin, qui exercera la même activité. |
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