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Michel Leiris



L'amoureux des crachats - Poéme


Poéme / Poémes d'Michel Leiris





Hors de l'antre à demi clos d'une bouche j'ai vu jaillir l'oracle trouble des crachats

Venin d'azur

tu transformes mes yeux en deux crapauds cloués

sur le roc de ma face

au sommet de la montagne de mes années



Plusieurs rues s'étiraient jusqu'à l'extrémité des mares des lacs à fond de bourbe que l'on nomme horizons les trompettes y criaient comme crient des amarres et secouaient leurs échos pareils à des regrets inoubliés

Ce n'était que fracas multiplié de boucliers hennissements de chevaux enveloppés de longues

housses métalliques crissements d'amour des lances frémissantes
Les horloges sonnaient les balances frissonnaient les

enseignes dansaient



mais les femmes qui passaient ne voyaient pas cet

homme dont les pieds livraient une guerre sans pitié au trottoir et qui allait

sa tête fanée emprisonnée dans ses idées comme celle des guerriers du passé derrière la grille

de leur heaume ou bien les cloches en haut des tours de cathédrale



Les femmes passaient et ne le voyaient pas

cet homme

vêtu d'un grand manteau taché de craie

Elles ne s'arrêtaient pas

lorsqu'elles croisaient cette silhouette dérisoire

ce lumignon funeste et pâle

Il aurait aimé être étendu tout nu sur la chaussée foulé par les pieds des passants ceux des femmes surtout charmants talons d'or fin
Il aurait aimé que les immeubles s'écartassent pour laisser place à son désir d'une rupture violente



Elles ne le voyaient pas ces femmes qui passaient

elles ne le voyaient pas

parce qu'elles avaient oublié son nom

son nom à lui qu'un jour l'une d'elles avait nommé

l'Amoureux-des-crachats

Passez femmes passez votre chemin si tendre
On ne peut pas toujours se rappeler n'est-ce pas le nom de celui dont le fantôme vous frôla



Ombre d'ennui
Deuil de l'ombre

Vampire triste
Inquiétante larve quotidienne



On ne peut pas toujours se rappeler n'est-ce pas

puisque pareille aux mousses des menhirs

la mémoire sombre dans la nuit des temps parfois

malgré le tournoi passager des souvenirs

le galop de la terre aux abois

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Michel Leiris
(1901 - 1990)
 
  Michel Leiris - Portrait  
 
Portrait de Michel Leiris

La vie et l\'Ouvre de michel leiris

Né à Paris en 1901, Michel Leiris commence à écrire vers l'âge de vingt ans, bientôt soutenu par son aîné, le peintre André Masson, qui lui découvre tout un univers. Dès 1924, l'année où André Breton publie le Manifeste du surréalisme, il participe à ce mouvement, dont il se séparera en 1929, sans renoncer aux buts de total affranchissement psychologique et social que les surréalistes s'étaient as

Biographie / bibliographie

20 avril 1901 Naissance à Paris

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