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ÉLÉGIES


Poésie / Poémes d'Paul Verlaine





Alors qu'il n'a pas encore complètement achevé les Odes en son honneur, Verlaine entreprend d'écrire un second livre dédié à Philomène. Il le commence en août 1892, alors qu'il se trouve à l'hôpital Broussais. L'élégie 1 parait le 2 septembre, les élégies II et III le 9 et le 30 octobre dans le supplément littéraire de L'Echo de Paris. A la fin de l'année, l'ouvrage est achevé. Il paraît, chez Léon Vanier, en mai 1893.

Depuis longtemps, Verlaine avait l'intention d'écrire des élégies. Dès octobre 1887, il avait demandé à Jules Tellier de lui envoyer les ouvres de Catulle, Tibulle et Properce. D'autre part, il formait le projet de traduire Ovide en français. Si l'on néglige quelques pièces où il peint des scènes domestiques avec quelque complaisance pour le sordide et les amours de rencontre (VII, VIII), dans la plupart de ces poèmes Verlaine atteint le ton de l'élégie. Poème tendre et mélancolique, l'élégie chante les joies et surtout les tristesses de l'amour ; l'expression des sentiments intimes s'y allie à un art très subtil, où le ton familier, voire badin, de la conversation cache un grand raffinement de la forme. Verlaine évoque sa destinée tumultueuse et hasardeuse ; tantôt, d'une belle générosité, il s'élance vers le bien ; tantôt, il laisse apercevoir son air de « pitre » ou de « vaurien ». Le malheur l'a fait beaucoup souffrir et il a sombré dans un naufrage qui dure encore. Philomène a eu une destinée comparable. Elle a vécu une grande passion, qui s'est mal terminée et en conserve « le vertige et le goût du néant » (V). Ils ont su tous les deux unir leurs souffrances et peuvent envisager un avenir plus calme :



Opposant cordialement aux sorts contraires

La résignation de l'ultime amitié

(V)



Verlaine songe avec émotion au soir où débuta leur liaison : dans un cabaret, au son de l'accordéon, Philomène lui apparut et l'éblouit par sa gaieté et son entrain. Désormais, elle représente tout pour lui. Le poète entend chanter cette femme qu'il aime : son visage enfantin, ses mains « longues et blanches » (VI), son sourire. Trop âgé pour devenir le page de sa châtelaine, il désire être son écuyer, son « chanteur familier » (1), ou encore le sorcier qui l'envoûte, le moine confesseur, le protecteur :



L'archer, enfin, qui veille au créneau de la tour,

Châtelaine de mes domaines de Bohème.

(I)



Cet amour lui permet d'oublier le passé et son cortège de misères. Maintenant, il a trouvé le port, où l'on goûte la douceur de l'amour. Il rêve d'une affection où la tendresse l'emporte sur la passion, d'une « pure amitié ». Le ton des Élégies reste simple ; Verlaine y exprime directement son âme, y avoue ses faiblesses et ses insuffisances, mais aussi son désir d'une vie tranquille, sa nostalgie de pureté et de paix intérieure. Les Élégies sont écrites en alexandrins ; mais Verlaine en renouvelle l'art par un usage savant des coupes :



Mon cour tendre, indolent et fol, et puis cruel 3 / 5 / 4 (V)

Las d'aventures, fous d'aimer et d'en souffrir

5 / 3 / 4 (V)

Espoir, regret ou vceu, l'aile de la mouette

Vole autour et, la nuit, grise, est rose le jour.

2 / 4 // 1 / 5 (XI)

3/1/2/1/5



Le vers acquiert une admirable plénitude et une densité ferme. Ainsi dans ce passage sur la lame marine :



Elle est douce, elle est forte, elle sent bon la mer,

Son haleine est salée avec un goût amer.

Sa transparence aussi forme un miroir vivant.

(XI)



La critique n'a pas toujours su reconnaître la beauté des Élégies, qui marque un renouveau de la création poétique.

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Paul Verlaine
(1844 - 1896)
 
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Portrait de Paul Verlaine

Ouvres

Après une enfance à Metz, il fait ses études à Paris et trouve un emploi à l'Hôtel de Ville. Il fréquente les salons et cafés littéraires de la capitale et fait la connaissance de nombreux poètes célèbres de son époque. Ces rencontres l'incitent à composer lui aussi des vers. Verlaine est d'un caractère timide, et cette faiblesse est aggravée par des deuils familiaux : il se tourne alors vers la b

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