Philippe Jaccottet |
Lorsque la douleur l'eut hissé sur son toit envié un savoir évident se montra à lui sans brouillard. Il ne se trouvait plus dans sa liberté telles deux rames au milieu de l'océan. L'ensorcelant désir de parole s'était, avec les eaux noires, retiré. Çà et là persistaient de menus tremblements dont il suivait le sillage aminci. Une colombe de granit à demi masquée mesurait de ses ailes les restes épars du grand oeuvre englouti. Sur les pentes humides, la queue des écumes et la course indigente des formes rompues. Dans l'ère rigoureuse qui s'ouvrait, aboli serait le privilège de récolter sans poison. Tous les ruisseaux libres et fous de la création avaient bien fini de ruer. Au terme de sa vie il devrait céder à l'audace nouvelle ce que l'immense patience lui avait, à chaque aurore, consenti. Le jour tournoyait sur Thouzon. La mort n'a pas comme le lichen arasé l'espérance de la neige. Dans le creux de la ville immergée, la corne de la lune mêlait le dernier sang et le premier limon. |
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Philippe Jaccottet (1925 - ?) |
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Portrait de Philippe Jaccottet | |||||||||
Biographie / OuvresL'oeuvre de Jaccottet puise son inspiration dans la contemplation du paysage de sa région. Son oeuvre se distingue notamment par le dépouillement et l'absence d'artifices. Son sujet préféré est l'étude de l'homme dans son milieu naturel. Son journal, publié dans « Les semaisons, carnets 1954-62 » (1984) et « La seconde semaison, carnets 1980-94 » (1996), montre son engagement permanent dans une co |
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