Tristan Corbière |
Ce fut un vrai poète : Il n'avait pas de chant. Mort, il aimait le jour et dédaigna de geindre. Peintre : il aimait son art - Il oublia de peindre... Il voyait trop - Et voir est un aveuglement. - Songe-creux : bien profond il resta dans son rêve; Sans lui donner la forme en baudruche qui crève, Sans ouvrir le bonhomme, et se chercher dedans. - Pur héros de roman : il adorait la brune, Sans voir s'elle était blonde... Il adorait la lune; Mais il n'aima jamais - Il n'avait pas le temps. - - Chercheur infatigable : Ici-bas où l'on rame, Il regardait ramer, du haut de sa grande âme, Fatigué de pitié pour ceux qui ramaient bien... Mineur de la pensée : il touchait son front blême, Pour gratter un bouton ou gratter le problème Qui travaillait là - Faire rien. - -- Il parlait : « Oui, la Muse est stérile ! elle est fille D'amour, d'oisiveté, de prostitution; Ne la déformez pas en ventre de famille Que couvre un étalon pour la production! « O vous tous qui gâchez, maçons de la pensée! Vous tous que son caprice a touchés en amants, - Vanité, vanité - La folle nuit passée, Vous l'affichez en charge aux yeux ronds des manants! « Elle vous effleurait, vous, comme chats qu'on noie, Vous avez accroché son aile ou son réseau, Fiers d'avoir dans vos mains un bout de plume d'oie, Ou des poils à gratter, en façon de pinceau ! » - Il disait : « ô naïf Océan ! ô fleurettes, Ne sommes-nous pas là, sans peintres, ni poètes!... Quel vitrier a peint! quel aveugle a chanté!... Et quel vitrier chante en raclant sa palette, « Ou quel aveugle a peint avec sa clarinette ! - Est-ce l'art?... » - Lui resta dans le Sublime Bête Noyer son orgueil vide et sa virginité. Méditerranée. |
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Tristan Corbière (1845 - 1875) |
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Portrait de Tristan Corbière | |||||||||
Biographie / Ouvres1845. |
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