Victor Hugo |
Je te salue au seuil sévère du tombeau! Va chercher le vrai, toi qui sus trouver le beau. Monte l'âpre escalier. Du haut des sombres marches, Du noir pont de l'abîme on entrevoit les arches; Va ! meurs ! la dernière heure est le dernier degré ! Pars, aigle, tu vas voir des gouffres à ton gré; Tu vas voir l'absolu, le réel, le sublime, Tu vas sentir le vent sinistre de la cime Et.l'éblouissement du prodige éternel. Ton olympe, tu vas le voir du haut du ciel; Tu vas, du haut du vrai, voir l'humaine chimère, Même celle de .Job, même celle d'Homère, Ame, et du haut de Dieu tu vas voir Jéhovah. Monte! esprit! Grandis, plane, ouvre tes ailes, va! Lorsqu'un vivant no'us quitte, ému, je le contemple; Car, entrer dans la mort, c'est entrer dans le temple ; Et, quand un homme meurt, je vois distinctement Dans son ascension mon propre avènement. Ami, je sens du sort la sombre plénitude; J'ai commencé la mort par de la solitude; Je vois mon profond soir vaguement s'étoiler; Voici l'heure où je vais aussi, moi, m'en aller. Mon fil, trop long, frissonne et touche presque au [glaive; Le vent qui t'emporta doucement me soulève, Et je vais suivre ceux qui m'aimaient, moi, banni. Leur oil fixe m'attire au fond de l'infini. J'y cours. Ne fermez pas la porte funéraire. Passons, car c'est la loi; nul ne peut s'y soustraire; Tout penche, et ce grand siècle, avec tous ses rayons, Entre en cette ombre immense, où pâles, nous fuyons. Oh! quel farouche bruit font dans le crépuscule Les chênes qu'on abat pour le bûcher d'Hercule! Les chevaux de la Mort se mettent à hennir Et sont joyeux, car l'âge éclatant va finir ; Ce siècle altier, qui sut dompter le vent contraire. Expire... O Gautier! toi, leur égal et leur frère, Tu pars après Dumas, Lamartine et Musset. L'onde antique est tarie où l'on rajeunissait; Comme il n'est plus de Styx, il n'est plus de Jouvence. Le dur faucheur avec sa large lame avance, Pensif et pas à pas, vers le reste du blé; C'est mon tour; et la nuit emplit mon oil troublé Qui, devinant,Tiélas! l'avenir des colombes, Pleure sur des berceaux et sourit à des tombes. |
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Victor Hugo (1802 - 1885) |
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Portrait de Victor Hugo | |||||||||
Biographie / OuvresC'est Hugo qui, sans doute, a le mieux incarné le romantisme: son goût pour la nature, pour l'exotisme, ses postures orgueilleuses, son rôle d'exilé, sa conception du poète comme prophète, tout cela fait de l'auteur des Misérables l'un des romantiques les plus purs et les plus puissants qui soient. La force de son inspiration s'est exprimée par le vocabulaire le plus vaste de toute la littérature Chronologie1802 - Naissance le 26 Février à Besançon. Il est le troisième fils du capitaine Léopold Hugo et de Sophie Trébuchet. Suivant les affectations du père, nommé général et comte d'Empire en 1809, la famille Hugo s'établit en Italie, en Espagne, puis à Paris. Chronologie historique1848 Bibliographie sÉlective |
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