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Victor Hugo



Aux femmes - Poéme


Poéme / Poémes d'Victor Hugo





Quand tout se lait petit, femmes, vous restez grandes.

En vain, aux murs sanglants accrochant des guirlandes.

Ils ont ouvert le bal ci la danse; ô nos sours,

Devant ces scélérats transformés en valseurs

Vous haussez, - châtiment! - vos charmantes épaules.

Votre divin sourire extermine ces drôles.

En vain leur frac scintille; en vain, brigands,

Pour vous plaire ils ont mis à leurs grilles des gants.

Et de leur vil tricorne ils ont doré les ganses;

Vous bafouez ces gants, ces fracs, ces élégances.

Cet empire tout neuf et déjà vermoulu.

Dieu vous a tout donné, femmes; il a voulu

Que les seuls alcyons tinssent tète à l'orage.

Et qu'étant la beauté, vous lussiez le courage.

Les femmes ici-bas et là-haut les aïeux.
Voilà ce qui nous reste!

Abjection! nos yeux
Plongent dans une nuit toujours plus épaissie.
Oui, le peuple français, oui, le peuple messie.
Oui, ce grand lorgeron du droit universel
Dont, depuis soixante ans, l'enclume sous le ciel
Luit et sonne, dont l'àtre incessamment pétille,



Qui fit voler au vent les tours de la
Bastille,

Qui broya, se dressant tout à coup souverain.

Mille ans de royauté sous son talon d'airain.

Ce peuple dont le souffle, ainsi que des fumées.

Faisait tourbillonner les rois et les années.

Qui. lorsqu'il se fâchait, brisait sous son bâton

Le géant
Robespierre et le titan
Danton,

Oui, ce peuple invincible, oui, ce peuple superbe

Tremble aujourd'hui, pâlit, frissonne comme l'herbe.

Claque des dents, se cache et n'ose dire un mot

Devant
Magnan, ce reitre, et
Trop long, ce grimaud!

Oui, nous vovons cela!
Nous tenant dans leurs serres.

Mangeant les millions en face des misères.

Les
Fortoul, les
Rouher, êtres stupéfiants.

S'étalent; on se tait.
Nos maîtres ruffians

A
Cayenne, en un bagne, abîme d'agonie.

Accouplent l'héroïsme avec l'ignominie;

On se tait.
Les pontons râlent; que dit-on? rien.

Des enfants sont forçats en
Afrique; c'est bien.

Si vous pleurez, tenez votre larme secrète.

Le bourreau, noir faucheur, debout dans sa charrette,

Revient de la moisson avec son panier plein;

Pas un souffle.
Il est là, ce
Tibère-Ezzelin1

Qui se croit scorpion et n'est que scolopendre.

Fusillant, et jaloux de
Haynau qui peut pendre;

Éclaboussé de sang, le prêtre l'applaudit;

Il est là, ce
César chauve-souris qui dit

Aux rois : voyez mon sceptre; aux gueux : voyez mon crime;

Ce vainqueur qui, béni, lavé, sacré, sublime.

De deux pourpres vêtu, dans l'histoire s'assied

Le globe dans sa main, un boulet à son pied;

Il nous crache au visage, il règne! nul ne bouge.

Et c'est à votre front qu'on voit monter le rouge.
C'est vous qui vous levez et qui vous indignez.



Femmes; le sein gonflé, les yeux de pleurs baignés.
Vous huez le tyran, vous consolez les tombes.
Et le vautour frémit sous le bec des colombes!

Et moi, proscrit pensif, je vous dis :
Gloire à vous!
Oh! oui, vous êtes bien le sexe fier et doux,
Ardent au dévouement, ardent à la souffrance,
Toujours prêt à la lutte, à
Béthulie1, en
France,
Dont l'âme à la hauteur des héros s'élargit.
D'où se lève
Judith, d'où
Charlotte surgit!
Vous mêlez la bravoure à la mélancolie.
Vous êtes
Porcia, vous êtes
Cornélie2,
Vous êtes
Arria3 qui saigne et qui sourit;
Oui, vous avez toujours en vous ce même esprit
Qui relève et soutient les nations tombées,
Qui suscite la
Juive et les sept
Machabées4,
Qui dans toi,
Jeanne d'Arc, fait revivre
Amadis5.
Et qui, sur le chemin des tyrans interdits.
Pour les épouvanter dans leur gloire éphémère,
Met tantôt une vierge et tantôt une mère!

Si bien que, par moments, lorsqu'en nos visions
Nous voyons, secouant un glaive de rayons,
Dans les deux apparaître une figure ailée,
Saint-Michel sous ses pieds foulant l'hydre écaillée,
Nous disons : c'est la
Gloire et c'est la
Liberté!
Et nous croyons, devant sa grâce et sa beauté.
Quand nous cherchons le nom dont il faut qu'on le

[nomme.
Que l'archange est plutôt une femme qu'un homme!

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Victor Hugo
(1802 - 1885)
 
  Victor Hugo - Portrait  
 
Portrait de Victor Hugo

Biographie / Ouvres

C'est Hugo qui, sans doute, a le mieux incarné le romantisme: son goût pour la nature, pour l'exotisme, ses postures orgueilleuses, son rôle d'exilé, sa conception du poète comme prophète, tout cela fait de l'auteur des Misérables l'un des romantiques les plus purs et les plus puissants qui soient. La force de son inspiration s'est exprimée par le vocabulaire le plus vaste de toute la littérature

Chronologie

1802
- Naissance le 26 Février à Besançon. Il est le troisième fils du capitaine Léopold Hugo et de Sophie Trébuchet. Suivant les affectations du père, nommé général et comte d'Empire en 1809, la famille Hugo s'établit en Italie, en Espagne, puis à Paris.

Chronologie historique

1848

Bibliographie sÉlective


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