Victor Hugo |
Comme elle avait la résille. D'abord la rime hésita. Ce devait être Inésille... -Mais non, c'était Pépita. Seize ans. Belle et grande fille... (Ici la rime insista : Rimeur, c'était Inésille. Rime, c'était Pépita.) Pépita... - Je me rappelle ! Oh ! le doux passé vainqueur, Tout le passé, pêle-mêle, Revient à flots dans mon cour ; Mer, ton flux roule et rapporte Les varechs et les galets. Mon père avait une escorte ; Nous habitions un palais ; Dans cette Espagne que j'aime. Au point du jour, au printemps, Quand je n'existais pas même, Pépita-j'avais huit ans - Me disait : - Fils, je me nomme Pepa ; mon père est marquis. -Moi, je me croyais un homme, Étant en pays conquis. Dans sa résille de soie Pepa mettait des doublons ; De la flamme et de la joie Sortaient de ses cheveux blonds. Tout cela, jupe de moire, Veste de toréador, Velours bleu, dentelle noire, Dansait dans un rayon d'or. Et c'était presque une femme Que Pépita mes amours. L'indolente avait mon âme Sous son coude de velours. Je palpitais dans sa chambre Comme un nid près du faucon. Elle avait un collier d'ambre, Un rosier sur son balcon. Tous les jours un vieux qui pleure Venait demander un sou ; Un dragon à la même heure Arrivait je ne sais d'où. Il piaffait sous la croisée. Tandis que le vieux râlait De sa vieille voix brisée : La charité, s'il vous plaît ! Et la belle au collier jaune, Se penchant sur son rosier. Faisait au pauvre l'aumône Pour la faire à l'officier. L'un plus fier, l'autre moins sombre, Ils partaient, le vieux hagard Emportant un sou dans l'ombre, Et le dragon un regard. J'étais près de la fenêtre, Tremblant, trop petit pour voir, Amoureux sans m'y connaître, Et bête sans le savoir. Elle disait avec charme : Marions-nous ! choisissant Pour amoureux le gendarme Et pour mari l'innocent. Je disais quelque sottise ; Pepa répondait : Plus bas ! M'éteignant comme on attise ; Et, pendant ces doux ébats. Les soldats buvaient des pintes Et jouaient au domino Dans les grandes chambres peintes Du palais Masserano. |
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Victor Hugo (1802 - 1885) |
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Portrait de Victor Hugo | |||||||||
Biographie / OuvresC'est Hugo qui, sans doute, a le mieux incarné le romantisme: son goût pour la nature, pour l'exotisme, ses postures orgueilleuses, son rôle d'exilé, sa conception du poète comme prophète, tout cela fait de l'auteur des Misérables l'un des romantiques les plus purs et les plus puissants qui soient. La force de son inspiration s'est exprimée par le vocabulaire le plus vaste de toute la littérature Chronologie1802 - Naissance le 26 Février à Besançon. Il est le troisième fils du capitaine Léopold Hugo et de Sophie Trébuchet. Suivant les affectations du père, nommé général et comte d'Empire en 1809, la famille Hugo s'établit en Italie, en Espagne, puis à Paris. Chronologie historique1848 Bibliographie sÉlective |
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