Victor Hugo |
Donc un homme a vécu qui s'appelait Varron, Un autre Paul-Émile, un autre Cicéron2; Ces hommes ont été grands, puissants, populaires, Ont marché, précédés des faisceaux consulaires. Ont été généraux, magistrats, orateurs; Ces hommes ont parlé devant les sénateurs; Ils ont vu, dans la poudre et le bruit des armées. Frissonnantes, passer les aigles enflammées; La foule les suivait et leur battait des mains; Ils sont morts; on a fait à ces fameux romains Des tombeaux dans le marbre, et d'autres dans l'histoire; Leurs bustes, aujourd'hui, graves comme la gloire. Dans l'ombre des palais ouvrant leurs vagues yeux, Révent autour de nous, témoins mystérieux; Ce qui n'empêche pas, nous, gens des aunes âges, Que, lorsque nous parlons de ces grands personnages. Nous ne disions : tel jour Varron fut un butor, Paul-Émile a mal lait, Cicéron eut grand tort. Et lorsque nous traitons ainsi ces morts illustres. Tu prétends, toi, maraud, goujat parmi les rustres. Que je parle de toi qui lasses le dédain, Sans dire hautement : cet homme est ungredin! Tu veux que nous prenions dès gants ci des mitaines Avec toi, qu'eût chassé Sparte aussi bien qu'Athènes! Force gens t'ont connu jadis quand tu courais Les brelans, les enfers, les trous, les cabarets, Quand on voyait, le soir, tantôt dans l'ombre obscure, Tantôt devant la porte entr'ouverte et peu sûre D'un antre d'où sortait une rouge clarté, Ton chef branlant couvert d'un feutre cahoté. Tu t'es fait broder d'or par l'empereur bohème. Ta vie est une farce et se guindé en poème. Et que m'importe à moi, penseur, juge, ouvrier, Que décembre, étranglant dans ses poings février, T'installe en un palais, toi qui souillais un bouge! Allez aux tapis francs1 de Vanvre et de Montrouge, Coure/ aux galetas, aux caves, aux taudis. Les échos vous diront partout ce que je dis : - Ce drôle était voleur avant d'être ministre! - Ah! tu veux qu'on t'épargne, imbécile sinistre! Ah! te voilà content, satisfait, souriant! Sois tranquille. J'irai par la ville criant : Citoyens! voyez-vous ce jésuite aux yeux jaunes? Jadis, c'était Brutus. Il haïssait les trônes. Il les aime aujourd'hui. Tous métiers lui sont bons; Il est pour le succès. Donc, à bas les Bourbons, Mais vive l'empereur! à bas tribune et charte! Il déteste Chambord, mais il sert Bonaparte. On l'a fait sénateur, ce qui le rend fougueux. Si les choses étaient à leur place, ce gueux Qui n'a pas, nous dit-il en déclamant son rôle. Les fleurs de lys au cour, les aurait sur l'épaule! Londres. Aoùt 1852. |
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Victor Hugo (1802 - 1885) |
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Portrait de Victor Hugo | |||||||||
Biographie / OuvresC'est Hugo qui, sans doute, a le mieux incarné le romantisme: son goût pour la nature, pour l'exotisme, ses postures orgueilleuses, son rôle d'exilé, sa conception du poète comme prophète, tout cela fait de l'auteur des Misérables l'un des romantiques les plus purs et les plus puissants qui soient. La force de son inspiration s'est exprimée par le vocabulaire le plus vaste de toute la littérature Chronologie1802 - Naissance le 26 Février à Besançon. Il est le troisième fils du capitaine Léopold Hugo et de Sophie Trébuchet. Suivant les affectations du père, nommé général et comte d'Empire en 1809, la famille Hugo s'établit en Italie, en Espagne, puis à Paris. Chronologie historique1848 Bibliographie sÉlective |
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