Victor Hugo |
La conscience humaine est morte; dans l'orgie. Sur elle il s'accroupit; ce cadavre lui plaît; Par moments, gai, vainqueur, la prunelle rougic, Il se retourne et donne à la morte un soufflet. La prostitution du juge est la ressource-Les prêtres font frémir l'honnête homme éperdu; Dans le champ du potier ils déterrent la bourse2; Sibour revend le Dieu quejudas a vendu. Ils disent : - César règne, et le Dieu des armées L'a fait son élu. Peuple, obéis, tu le dois! - Pendant qu'ils vont chantant, tenant leurs mains fermées. On voit le sequin d'or qui passe entre leurs doigts. Oh! tant qu'on verra trôner, ce gueux, ce prince, Par le pape béni, monarque malandrin. Dans une main le sceptre et dans l'autre la pince, Charlcmagne taillé par Satan dans Mandrin; Tant qu'il se vautrera, broyant dans ses mâchoires Le serment, la vertu, l'honneur religieux. Ivre, affreux, vomissant sa honte sur nos gloires; Tant qu'on verra cela sous le soleil des cieux; Quand même grandirait l'abjection publique A ce point d'adorer l'exécrable trompeur; Quand même l'Angleterre et même l'Amérique Diraient à l'exilé : - Va-t'en! nous avons peur! Quand même nous serions comme la feuille morte; Quand, pour plaire à César, on nous rentrait, tous; Quand le proscrit devrait s'enfuir de porte en porte, Aux hommes déchiré comme un haillon aux clous; Quand le désert, où Dieu contre'l'homme proteste. Bannirait les bannis, chasserait les chassés; Quand même, infâme aussi, lâche comme le reste, Le tombeau jetterait dehors les trépassés; Je ne fléchirai pas! Sans plainte dans la bouche. Calme, le deuil au eccur, dédaignant le troupeau. Je vous embrasserai dans mon exil farouche, Patrie, ô mon autel! Liberté, mon drapeau! Mes nobles compagnons, je garde votre culte; Bannis, la république est là qui nous unit. J'attacherai la gloire à tout ce qu'on insulte; Je jetterai l'opprobre à tout ce qu'on bénit! Je serai, sous le sac de cendre qui me couvre1, La voix qui dit : malheur! la bouche qui dit : non! Tandis que tes valets te montreront ton Louvre, Moi, je te montrerai, césar, ton cabanon. Devant les trahisons et les tètes courbées. Je croiserai les bras, indigné, mais serein. Sombre fidélité pour les choses tombées. Sois ma force et ma joie et mon pilier d'airain! Oui, tant qu'il sera là, qu'on cède ou qu'on persiste, O France! France aimée et qu'on pleure toujours, Je ne reverrai pas ta terre douce et triste, Tombeau de mes aïeux et nid de mes amours! Je ne reverrai pas ta rive qui nous tente, France! hors le devoir, hélas! j'oublîrai tout. Parmi les éprouvés je planterai ma tente. Je resterai proscrit, voulant rester debout. J'accepte l'âpre exil, n'eùt-il ni fin ni terme, Sans chercher à savoir et sans considérer Si quelqu'un a plié qu'on aurait cru plus ferme, Et si plusieurs s en vont qui devraient demeurer. Si l'on n'est plus que mille, eh bien, j'en suis! Si même Ils ne sont plus que cent, je brave encor Sylla; S'il en demeure dix, je serai le dixième; Et s'il n'en reste qu'un, je serai celui-là! |
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Victor Hugo (1802 - 1885) |
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Portrait de Victor Hugo | |||||||||
Biographie / OuvresC'est Hugo qui, sans doute, a le mieux incarné le romantisme: son goût pour la nature, pour l'exotisme, ses postures orgueilleuses, son rôle d'exilé, sa conception du poète comme prophète, tout cela fait de l'auteur des Misérables l'un des romantiques les plus purs et les plus puissants qui soient. La force de son inspiration s'est exprimée par le vocabulaire le plus vaste de toute la littérature Chronologie1802 - Naissance le 26 Février à Besançon. Il est le troisième fils du capitaine Léopold Hugo et de Sophie Trébuchet. Suivant les affectations du père, nommé général et comte d'Empire en 1809, la famille Hugo s'établit en Italie, en Espagne, puis à Paris. Chronologie historique1848 Bibliographie sÉlective |
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