Victor Hugo |
Il est certains bourgeois, prêtres du dieu Boutique, Plus voisins de Clirysès2 que de Caton d'Utique, Menant par-dessus tout la rente et le coupon. Qui, voguant à la Bourse et tenant un harpon, Honnêtes gens d'ailleurs, mais de la grosse espèce, Acceptent Phalaris3 par amour pour leur caisse, Et le taureau d'airain à cause du veau d'or. Ils ont voté. Demain ils voteront encor. Si quelque libre écrit entre leurs mains s'égare. Les pietls sur les chenets et fumant son cigare. Chacun de ces votants tout bas raisonne ainsi : « Ce livre est Ion choquant. De quel droit celui-ci Est-il généreux, ferme et fier, quand je suis lâche? En attaquant monsieur Bonaparte, on me fâche. Je pense comme lui que c'est un gueux; pourquoi Le dit-il? Soit, d'accord, Bonaparte est sans foi Ni loi; c'est un parjure, un brigand, un faussaire. C'est vrai; sa politique est année en corsaire; Il a banni jusqu'à des juges suppléants; Il a coupé leur bourse aux princes d'Orléans; C'est le pire gredin qui soit sur cette tene; Mais puisque j'ai voté pour lui, l'on doit se taire. Ecrire contre lui, c'est me blâmer au fond; C'est me dire : voilà comment les braves font; Et c'est une façon, à nous qui restons neutres, De nous faire sentir que nous sommes des pleutres. J'en conviens, nous avons une corde au poignet. Que voulez-vous? la Bourse allait mal; on craignait La république rouge, et même un peu la rose; Il fallait bien finir par faire quelque chose; On trouve ce coquin, on le fait empereur; C'est tout simple. On voulait éviter la teneur, Le spectre de monsieur Roinieu, la jacquerie; On s'est réfugié dans cette escroquerie. Or, quand on dit du mal de ce gouvernement, Je me sens chatouillé désagréablement. Qu'on fouaille avec raison cet homme, c'est possible; Mais c'est m'insinuer à moi, bourgeois paisible Qui fis ce scélérat empereur ou consul. Que j'ai dit oui par peur et vivat par calcul. Je trouve impertinent, parbleu, qu'on me le dise. M'étant enseveli dans cette couardise, Il me déplaît qu'on soit intrépide aujourd'hui. Et je tiens pour affront le courage d'autrui. » Penseurs, quand vous marquez au front l'homme punique1 Qui de la loi sanglante arracha la tunique. Quand vous vengez le peuple à la gorge saisi. Le serment et le droit, vous êtes, songez-y, Entre Sbogar qui règne et Géronte qui vote; Et voue plume ardente, anarchique. indévote, Démagogique, impie, attente d'un côté A ce crime; de l'aune, à cette lâcheté. Jersey. Novembre 1852. |
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Victor Hugo (1802 - 1885) |
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Portrait de Victor Hugo | |||||||||
Biographie / OuvresC'est Hugo qui, sans doute, a le mieux incarné le romantisme: son goût pour la nature, pour l'exotisme, ses postures orgueilleuses, son rôle d'exilé, sa conception du poète comme prophète, tout cela fait de l'auteur des Misérables l'un des romantiques les plus purs et les plus puissants qui soient. La force de son inspiration s'est exprimée par le vocabulaire le plus vaste de toute la littérature Chronologie1802 - Naissance le 26 Février à Besançon. Il est le troisième fils du capitaine Léopold Hugo et de Sophie Trébuchet. Suivant les affectations du père, nommé général et comte d'Empire en 1809, la famille Hugo s'établit en Italie, en Espagne, puis à Paris. Chronologie historique1848 Bibliographie sÉlective |
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