Victor Hugo |
Qui que tu sois, redoute, au gouffre où tu te plonges, Le vague coudoiement des vains passants des songes. Fuyez d'ici, vivants, dont l'esprit, fléchissant Sous l'incompréhensible et sous l'éblouissant, Peut à peine porter le poids d'un évangile. Ce n'est pas sans danger que des hommes d'argile, Tremblants quand ils sont las, glacés quand ils sont nus, Dialoguent dans l'ombre avec des inconnus. À force de songer, ô pâle solitaire, Tu sentiras de l'air sous toi ; tu perdras terre... -Oh ! les souffles ! craignez les souffles de la nuit ! Où vous emportent-ils ? Ceux qu'un rêve conduit Deviennent rêve eux-mêmes, et, sans être coupables, Tombent dans l'essaim noir des faces impalpables. C'est alors qu'éperdu, terrible, tu tendras Les mains comme les morts sous leurs lugubres draps. Mais à quoi bon ? Tout fuit. Un vent qui vous pénètre Vous roule dans l'espace à jamais... - Ô deuil ! être Des espèces d'esprits misérables chassés ! Oh ! n'entendre jamais ce mot céleste : assez ! Un souffle vous apporte, un souffle vous remmène. On a, sur ce qu'on garde encor de forme humaine, D'obscurs attouchements et des passages froids ; Toute l'ombre n'est plus qu'une suite d'effrois ; On sent les longs frissons des roseaux de l'abîme. Jamais le jour. Jamais un rayon qui ranime. Errer ! errer ! errer ! errer ! faire des nouds D'ombre, dans l'invisible et le vertigineux ! Monter, tomber, monter, retomber ! sort terrible ! Être à jamais l'informe égaré dans l'horrible. Le contraire du jour, de l'hymne et de l'encens ! Des témoins de l'énigme, à jamais frémissants Devant le ténébreux, devant l'inabordable, Et face à face avec un voile formidable ! Etre, en dehors de l'être, en dehors du trépas, Quelque chose d'affreux qui souffre et ne vit pas ! Être de la clameur dans l'infini semée. Un vague tourbillon pleurant, une fumée De larves, de regards, de masques, de rumeurs, De voix ne pouvant pas même dire : je meurs, Passant toujours, toujours, toujours, comme un flot sombre. Sous les arches sans fin du hideux pont de l'ombre ! |
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Victor Hugo (1802 - 1885) |
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Portrait de Victor Hugo | |||||||||
Biographie / OuvresC'est Hugo qui, sans doute, a le mieux incarné le romantisme: son goût pour la nature, pour l'exotisme, ses postures orgueilleuses, son rôle d'exilé, sa conception du poète comme prophète, tout cela fait de l'auteur des Misérables l'un des romantiques les plus purs et les plus puissants qui soient. La force de son inspiration s'est exprimée par le vocabulaire le plus vaste de toute la littérature Chronologie1802 - Naissance le 26 Février à Besançon. Il est le troisième fils du capitaine Léopold Hugo et de Sophie Trébuchet. Suivant les affectations du père, nommé général et comte d'Empire en 1809, la famille Hugo s'établit en Italie, en Espagne, puis à Paris. Chronologie historique1848 Bibliographie sÉlective |
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