Victor Hugo |
Oh! qui que vous soyez, jeune ou vieux, riche ou sage. Si jamais vous n'avez épié le passage, Le soir, d'un pas léger, d'un pas mélodieux, D'un voile blanc qui glisse et fuit dans les ténèbres. Et, comme un météore au sein des nuits funèbres. Vous laisse dans le cour un sillon radieux; Si vous ne connaissez que pour l'entendre dire Au poète amoureux qui chante et qui soupire. Ce suprême bonheur qui fait nos jours dorés, De posséder un cour sans réserve et sans voiles, De n'avoir pour flambeaux, de n'avoir pour étoiles, De n'avoir pour soleils que deux yeux adorés; Si vous n'avez jamais attendu, morne et sombre. Sous les vitres d'un bal qui rayonne dans l'ombre, L'heure où pour le départ les portes s'ouvriront. Pour voir votre beauté, comme un éclair qui brille. Rose avec des yeux bleus et toute jeune fille, Passer dans la lumière avec des fleurs au front; Si vous n'avez jamais senti la frénésie De voir la main qu'on veut par d'autres mains choisie. De voir le cour aimé battre sur d'autres cours; Si vous n'avez jamais vu d'un oil de colère La valse impure, au vol lascif et circulaire. Effeuiller en courant les femmes et les fleurs; Si jamais vous n'avez descendu les collines, Le cour tout débordant d'émotions divines; Si jamais vous n'avez le soir, sous les tilleuls, Tandis qu'au ciel luisaient des étoiles sans nombre, Aspiré, couple heureux, la volupté de l'ombre, Cachés, et vous parlant tout bas, quoique tout seuls; Si jamais une main n'a fait trembler la vôtre; Si jamais ce seul mot qu'on dit l'un après l'autre, Je t'aime! n'a rempli votre âme tout un jour; Si jamais vous n'avez pris en pitié les trônes En songeant qu'on cherchait les sceptres, les couronnes. Et la gloire, et l'empire, et qu'on avait l'amour! La nuit, quand la veilleuse agonise dans l'urne. Quand Paris, enfoui sous la brume nocturne Avec la tour saxonne1 et l'église des Goths8, Laisse sans les compter passer les heures noires Qui, douze fois, semant les rêves illusoires, S'envolent des clochers par groupes inégaux; Si jamais vous n'avez, à l'heure où tout sommeille. Tandis qu'elle dormait, oublieuse et vermeille. Pleuré comme un enfant à force de souffrir. Crié cent fois son nom du soir jusqu'à l'aurore. Et cru qu'elle viendrait en l'appelant encore, Et maudit votre mère, et désiré mourir; Si jamais vous n'avez senti que d'une femme Le regard dans votre âme allumait une autre âme, Que vous étiez charmé, qu'un ciel s'était ouvert, Et que pour cette enfant, qui de vos pleurs se joue. Il vous serait bien doux d'expirer sur la roue; ... Vous n'avez point aimé, vous n'avez point souffert ! |
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Victor Hugo (1802 - 1885) |
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Portrait de Victor Hugo | |||||||||
Biographie / OuvresC'est Hugo qui, sans doute, a le mieux incarné le romantisme: son goût pour la nature, pour l'exotisme, ses postures orgueilleuses, son rôle d'exilé, sa conception du poète comme prophète, tout cela fait de l'auteur des Misérables l'un des romantiques les plus purs et les plus puissants qui soient. La force de son inspiration s'est exprimée par le vocabulaire le plus vaste de toute la littérature Chronologie1802 - Naissance le 26 Février à Besançon. Il est le troisième fils du capitaine Léopold Hugo et de Sophie Trébuchet. Suivant les affectations du père, nommé général et comte d'Empire en 1809, la famille Hugo s'établit en Italie, en Espagne, puis à Paris. Chronologie historique1848 Bibliographie sÉlective |
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