Yves Bonnefoy |
Je passais près du feu dans la salle vide Aux volets clos, aux lumières éteintes, Et je vis qu'il brûlait encore, et qu'il était même En cet instant à ce point d'équilibre Entre les forces de la cendre, de la braise Où la flamme va pouvoir être, à son désir, Soit violente soit douce dans l'étreinte De qui elle a séduit sur cette couche Des herbes odorantes et du bois mort. Lui, c'est cet angle de la branche que j'ai rentrée Hier, dans la pluie d'été soudain si vive, Il ressemble à un dieu de l'Inde qui regarde Avec la gravité d'un premier amour Celle qui veut de lui que l'enveloppe La foudre qui précède l'univers. Demain je remuerai La flamme presque froide, et ce sera Sans doute un jour d'été comme le ciel En a pour tous les fleuves, ceux du monde Et ceux, sombres, du sang. L'homme, la femme, Quand savent-ils, à temps, Que leur ardeur se noue ou se dénoue? Quelle sagesse en eux peut pressentir Dans une hésitation de la lumière Que le cri de bonheur se fait cri d'angoisse? Feu des matins, Respiration de deux êtres qui dorment, Le bras de l'un sur l'épaule de l'autre. Et moi qui suis venu Ouvrir la salle, accueillir la lumière. Je m'arrête, je m'assieds là, je vous regarde. Innocence des membres détendus, Temps si riche de soi qu'il a cessé d'être. |
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Yves Bonnefoy (1923 - ?) |
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