Yves Bonnefoy |
I D'une branche neigeuse à l'autre, de ces années Qui ont passé sans qu'aucun vent n'effraie leurs feuilles, Se font des éparpillements de la lumière À des moments, comme nous avançons dans ce silence. Et cette poudre ne retombe qu'infinie, Nous ne savons plus bien si un monde existe Encore, ou si nous recueillons sur nos mains mouillées Un cristal de réalité parfaitement pure. Couleurs avec le froid plus denses, bleus et pourpres Qui appelez de plus loin que le fruit, Êtes-vous notre rêve qui moins s'efface Qu'il ne se fait la prescience et la voie? Le ciel a bien lui-même ces nuées Dont l'évidence est fille de la neige, Et si nous nous tournons vers la route blanche, C'est la même lumière et la même paix. II Sauf, c'est vrai, que le monde n'a d'images Que semblables aux fleurs qui trouent la neige En mars, puis se répandent, toutes parées, Dans notre rêverie d'un jour de fête, Et qu'on se penche là, pour emporter Des brassées de leur joie dans notre vie, Bientôt les voici mortes, non tant dans l'ombre De leur couleur fanée que dans nos cours. Ardue est la beauté, presque une énigme, Et toujours à recommencer l'apprentissage De son vrai sens au flanc du pré en fleurs Que couvrent par endroits des plaques de neige. |
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Yves Bonnefoy (1923 - ?) |
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