Charles Baudelaire |
1. On me comprendra peut-être, enfin ! Le 13 octobre 1864, à Ancelle : C'est la première fois que je suis contraint d'écrire un livre, absolument humoristique, à la fois bouffon et sérieux, et où il me faut parler de tout. C'est ma séparation d'avec la bêtise moderne. On me comprendra peut-être, enfin ! Comment compter sur un acte de séparation d'avec la bêtise pour être enfin compris par elle? La rupture d'avec les autres et le « moderne » serait-elle le moyen d'être enfin accueilli par les autres et reconnu pour fondateur... de la « modernité » ? Cette volonté de sécession est redite un mois plus tard au même Ancelle : Ce livre sur la Belgique est [...] un essayage de mes griffes. Je m'en servirai plus tard contre la France. J'exprimerai patiemment toutes les raisons de mon dégoût du genre humain. Quand je serai absolument seul, je chercherai une religion (Thibétaine ou JaponaisE), [...] et au moment de la mort, j'abjurerai cette dernière religion pour bien montrer mon dégoût de la sottise universelle. Du rapprochement de ces deux textes il ressort encore une fois que la Belgique selon Baudelaire n'existe pas comme essence autonome. Elle n'est qu'un seuil à franchir pour invectiver pareillement et pour les mêmes raisons la France, qui n'existe pas non plus, sinon comme représentante du véritable ennemi, le « genre humain », la « sottise universelle ». Notons qu'ici l'adjectif « universelle » a remplacé l'adjectif « moderne » de la précédente lettre. Moderne et universelle sont équivalents dans les expressions interchangeables : « bêtise moderne », « sottise universelle ». Car si l'Esprit de Conformité est vivifié par l'esprit démocratique, par la sécularisation depuis la Renaissance, il précède notre époque où il apparaît aussi nettement. Les fragments vitupérant « l'amour des Belges pour les sociétés », définissent une structure transhistorique, antérieure à ses apparences d'aujourd'hui et d'hier : Vieux débris des sottises féodales : serments, lignages, corporations, jurandes, nations, métiers. Amour des corporations (Débris du Moyen AgE). Rompre avec la Belgique et la bêtise signifie rompre avec le fait culturel, avec ce par quoi les cultures sont : avec le religieux plutôt qu'avec telle ou telle religion, avec ce qui relie, et qui, en reliant, sacrifie dans un mythe l'individu. Montrer son dégoût de la sottise universelle, ce sera très logiquement abjurer la dernière religion : « au moment de la mort », oui, car ce sera mourir. L'abjuration ultime du moi alors sans pareil sera l'absolue solitude : sera le contraire de toutes les conjurations du monde - par quoi le monde est monde -, de tous ces serments, corporations, nations, dont la fatalité est d'interdire l'exception. « Quand j'aurai inspiré le dégoût et l'horreur universels », lit-on dans Fusées, « j'aurai conquis la solitude » 2 ; autant dire (nous retrouvons notre conclusion sur « Les Dons des fées ») : quand je serai mort. Se séparer du peuple belge (où « tout se fait à la prussienne » ; comme chez les « Yankees » ; comme chez les « chrétiens anthropophages de l'Amérique du Sud » ; comme chez les « Bordelais, Alsaciens, ou autres » ; comme à Genève ; comme chez les Anglais et les Russes3), ce sera se séparer du peuple tout court, du monde en tant que monde, conquérir le dehors du langage, se défaire du mimétisme qui est l'universel. Ce sera cesser de collaborer au fait naturel de l'imitation et enfin accéder à la transcendance de l'Esprit : ce sera n'être plus. Quelle impatience de la mort, de l'aphasie, en Baudelaire à Bruxelles ! - et pour que Baudelaire soit. Il s'agit pour lui - comme pour le dernier Nietzsche - d'achever de dégager l'esprit des entraînements naturels, d'accomplir la fin par quoi s'obtient la forme. Il s'agit de quitter l'écriture, de se déplacer de l'aporie sans fin dont elle est habitée, elle qui veut la différence, la hauteur, mais sait que ses mots appartiennent à tous. Abandonner derrière soi le langage, accéder à ce silence où personne n'entrera - d'autre que le moi, d'autre que le mort - pour être la place vide : J'avais besoin de changer de place ; j'étais devenu malade et enragé ; de quoi ? je n'en sais rien. L'impatience de mourir pour se sauver des autres apparaît de la plus pathétique façon dans la réaction du poète aux signes qui lui viennent depuis Paris, de l'influence que Les Fleurs du Mal exercent sur la nouvelle génération de poètes dans ces années 1865-1866. Trois extraits de la Correspondance des derniers mois lucides doivent être mis en rapport, qui montrent la démesure de la volonté baudelairienne, de finir, et que le changement de place sera accompli, le pas dans l'absolu de la solitude, gagné. Le premier extrait est d'une lettre du 12 janvier 1866 adressée à Mme Victor Hugo - qui habite Bruxelles avec ses fils -, dans laquelle Baudelaire résume une missive qu'il a reçue de Sainte-Beuve (c'est au moment où vient de paraître en trois numéros de la revue L'Art l'article passionné sur l'auteur des Fleurs du Mal, signé d'un certain Paul VerlainE) : Tout le reste de la lettre porte sur la jeunesse littéraire, sur les tentatives de la jeunesse, sur le talent mal employé, le talent sans grammaire et sans tradition. Enfin, ce brave ami conclut de la façon la plus bizarre, selon moi : il prétend qu'il faut que je retourne à Paris, et que c'est à moi à prendre la direction de tous ces mouvements désordonnés. La clairvoyance habituelle de Sainte-Beuve lui fait ici défaut. Je ne suis pas fait pour diriger qui que ce soit, et j'ai un profond mépris pour les gens qui ne savent pas se diriger eux-mêmes. La gloire vient à Baudelaire et Baudelaire la refuse. Cette gloire son vou le plus cher et qui serait sa vengeance. Ni la ferveur de Villiers de L'Isle-Adam dont il reçoit l'admiration depuis 1859 ; ni l'appel si concentré que lui a envoyé à Bruxelles « un jeune écrivain », du nom de Mallarmé4 ; ni maintenant cet enthousiasme de ce Verlaine audacieux ne suffisent à le séduire, à le retenir en ce monde. Au moment où l'école Baudelaire existe, Baudelaire doit cesser d'exister. Mais lisons le deuxième extrait, d'une lettre du 5 mars - dix jours avant Saint-Loup - où il rend compte à sa mère de l'article de Verlaine : Ma chère mère, comme je sais que les moindres bagatelles qui me concernent peuvent t'amuser, je t'envoie cet article, en trois numéros (il n'y en a que deux; je n'ai pas reçu le premieR), paru il y a longtemps. Il y a du talent chez ces jeunes gens ; mais que de folies ! quelles exagérations et quelle infatuation de jeunesse ! Depuis quelques années je surprenais, çà et là, des imitations et des tendances qui m'alarmaient. Je ne connais rien de plus compromettant que les imitateurs et je n'aime rien tant que d'être seul. Mais ce n'est pas possible ; et il paraît que l'école Baudelaire existe. Le troisième extrait est du même jour, à Jules Troubat : J'ai reçu de M. Lemerre deux des trois numéros de L'Art contenant l'article qui me concernait. L'oubli du premier numéro ne vaut pas que vous le dérangiez. J'ai parcouru ces deux journaux. Ces jeunes gens ne manquent certes pas de talent, mais que de folies! que d'inexactitudes! quelles exagérations! quel manque de précision! Pour dire la vérité, ils me font une peur de chien. Je n'aime rien tant que d'être seul. Des disciples apparaissent pour lesquels Baudelaire est un modèle. Ils sont ardents, engagés sans réserve dans l'aventure de poésie, et leur ton - ce « talent » - garantit leur conscience de la responsabilité spirituelle qu'il leur faudra assumer. Disciples dignes de la grandeur, de l'exigence de leur maître. Cela se sent justement à leurs « folies », dont il s'effraie comme des siennes, à leurs « exagérations », qui lui font peur parce qu'elles reforment son extravagance. Quelle revanche ! - Et d'abord contre Hugo. Car Hugo en 1866 n'est guère écouté par de tels cours neufs, si décidés au combat le plus haut, et lui n'a pour suiveurs (c'est Sainte-Beuve qui vient de le dire dans cette missive résumée à l'épouse du grand hommE) que des « disciples de la dernière manière [...] nés pour décrier l'école finissante et lui imprimer un ridicule indélébile »2. En outre ces témoignages d'admiration, qui sont des prises de conscience de soi pour celui qui les donne, si graves qu'ils transforment parfois celui qui les reçoit, c'est précisément à Hugo que Baudelaire autrefois les avait prodigués, avec quelle exaltation. En février 1840 - il n'avait pas dix-neuf ans - il avait écrit ceci à l'auteur de Marion Delorme : « Je vous aime comme on aime un héros, un livre [...]; à dix-neuf ans, eussiez-vous hésité à en écrire autant à un écrivain dont votre âme eût été éprise, à M. de Chateaubriand par exemple ? »3. Certes il y avait là autant de folies et d'exagérations qu'il s'en trouve maintenant sous la plume de Verlaine. Cependant c'était alors l'époque de la rencontre de Sara, donc du savoir que cette adhésion à la religion du maître prostituerait le disciple en le détournant de la charité. La hauteur à laquelle Sara devait être sacrifiée, au moins un moment avait porté pour nom : Victor Hugo. Et maintenant, dans le dernier hiver de Bruxelles, Baudelaire est confronté encore comme à sa mauvaise étoile à cette famille Hugo logeant à quelques rues de son hôtel. Recevant l'enthousiasme de Verlaine, le zèle de Mendès, l'amour de Villiers, le questionnement de Mallarmé, il se souvient que pour avoir, comme aujourd'hui ces nouveau-venus, singé jadis le Dieu inaccessible, un châtiment lui est venu : sa vie entière, dont ne le libérera qu'un châtiment pire, bientôt. Tout est en place désormais pour l'entrée de la mort : pour changer de place. Le Singe d'autrefois, ulcéré par le spectacle de lui-même que donne devant lui la Singerie belge - cette représentante de l'imitation universelle -, et butant toujours, chez Mme Hugo qui l'invite régulièrement, sur l'ombre encombrante du grand homme d'autant plus souverain qu'absent, découvre, c'est le comble, autour de ses Fleurs du Mal, quoi donc? - de nouveaux singes, autour de lui et par lui, de nouveaux imitateurs ! « Je surprenais, çà et là, des imitations [...] Je ne connais rien de plus compromettant que les imitateurs. » Pas une seconde Baudelaire n'a hésité. Qui se veut « absolument seul », se sépare même des solitaires qui l'admirent, et a fortiori si c'est pour sa solitude; il rompt même d'avec les mieux doués parmi ceux que son exemple, sans pareil, inspire ; et il refuse à sa solitude qu'elle soit telle qu'on puisse, même si héroïquement, l'imiter. Qui a décidé d'abjurer au moment de la mort sa dernière religion, abjurera ses fidèles, expulsera de sa place, alors enfin vide, même ces poètes par lui fécondés, dont la religion est sa propre hérésie. Baudelaire demande qu'on ne lui envoie pas, ou plutôt trouve inutile qu'on lui envoie la première partie, qu'il n'a pas, de l'article de Verlaine. L'événement de sa fin qu'il a décidée là, comment jamais en mesurer le sens ? Reportons-nous au 8 mai 1865 : « J'ai été contraint de dîner hier chez Mme Hugo, avec ses fils ». Or les fils Hugo sont les disciples les plus fidèles de leur père, - du coup la lettre poursuit : « Aussi bêtes que leur mère, et tous les trois, mère et fils, aussi bêtes, aussi sots que le père ! » Et Baudelaire ajoute ces mots dont la violence livre son âme : Si j'étais un homme célèbre, et si j'étais affligé d'un fils qui singeât mes défauts, je le tuerais par horreur de moi-même. La cohérence est visible, qui fait converger vers l'aphasie ces faisceaux de l'orgueil, de l'amour brisé et de la fuite devant soi. Non content d'être un « auteur belge » Hugo se trouve développé par des disciples qui le singent, ses propres enfants. Hugo d'abord n'a pas résisté à l'influence du mimétisme démocratique, répandu comme syphilis à travers l'Europe; ensuite a diffusé, de son immense ascendant, cette contagion de l'égalité; enfin le voici à Bruxelles, lors même qu'il en est absent, comme redoublé par ses avatars, reflets informes. Les fils de Hugo, singes d'un singe, Belges d'un Belge, sont bien ses enfants, ses in-fans : privés de parole autonome, subordonnés aux discours du père, ressassés par lui et le ressassant. Que continue à proliférer la théorie du « progrès », que prospère cette contamination des singularités par l'idéologie de la ressemblance, que la maladie du Même multiplie ses souillures, et la culture entière deviendra la bêtise, absorption de l'unique dans la monotonie de l'indifférence, silence infaillible de la répétition. Que Hugo ne tue pas ses enfants, et ceux-ci, sans voix, étoufferont le monde. Ou encore que la Belgique ne se tue pas, que persévère la sottise universelle, que vive le religieux d'aujourd'hui et de toujours, et la Différence, comme possibilité du langage, mourra. Baudelaire n'a plus qu'à choisir, au degré de critique de lui-même où est monté son fiel, entre deux aphasies. Celle des enfants Hugo et de ses propres disciples - récitants de mots qui passent à travers eux, qui abolissent en eux la personne individuelle -, et celle symétrique par laquelle s'opposer à pareil conformisme, se séparer de ce silence des mots. Mais il ne s'agit que de tourner dans le cercle de la conscience dans le mal, dont les deux possibles sont également fermés. Quelle différence, dans ce Bruxelles qui a les dimensions du monde, et de l'âme, entre un silence par une répétition du Même, et un silence par un suicide de l'Autre? Baudelaire par horreur de lui-même tuerait le fils qui le singerait. Il tuerait Verlaine, Mallarmé, Villiers - et à défaut il se tuerait lui-même. En somme il récupérerait sa différence par son absence - contre l'absence de différence. Il serait en n'étant plus - pour éviter, en étant, de n'être plus. Il parlerait d'une parole originale, dans son aphasie - ayant quitté l'aphasie collective. Dans la diffraction de l'aporie baudelairienne, les enfants Hugo sont deux miroirs de leur père, de sorte que le discours hugolien (démocratique, imitateur et imité, naturellement belgE) efface, monstrueux, la distinction entre père et fils2, invention et contrefaçon, et se propage à l'infini, désespérément semblable à soi. Il s'agit pour Baudelaire, qui prend Verlaine et Villiers pour ses fils conformistes, ses miroirs, de partir n'importe où hors de ce monde fantomatique, de réinventer une parole exceptionnelle, en dépit de la contagion des mots uniformément silencieux. Il s'agit de mourir. Pour que le Même (les Autres et leurs semblableS) n'absorbe pas l'altérité du moi (du moi sans pareiL), celui-ci s'absorbera en lui-même : « je serai absolument seul ». Pour que Hugo (le Belge, l'influence, le désiR) ne comprenne pas Baudelaire (l'anti-Belge, l'inimitable, la hauteuR), celui-ci n'écoutera pas les éloges de Verlaine, ne répondra pas à Mallarmé, ne retournera pas en France où Sainte-Beuve et ses amis l'attendent avec sans doute la gloire. Sécession sans appel : « on me comprendra peut-être, enfin ! » Sainte-Beuve lui a écrit ceci : « Si vous étiez ici, vous deviendriez, bon gré, mal gré, une autorité, un oracle, un poète consultant » '. Quelle qu'en soit la part de flatterie ou d'amicale consolation, cette invitation méconnaît une chose, que Baudelaire a dite à Ancelle : Mais j'ai encore plus d'orgueil que Victor Hugo, et je sens, je sais que je ne serai jamais si bête que lui. Il n'y aura pas autour des Fleurs du Mal une corporation, une société, un lignage, un « troupeau de moutons » 3, un club, un bloc, une association, un militarisme, une bande, un groupe, un syndicat, comme il s'en trouve autour des Misérables, autour de l'esprit républicain, comme il s'en forme tous les jours dans le salon de Mme Hugo, dans les réunions électorales ou les enterrements de libres-penseurs. Il n'y aura pas, disons, de Belgique baudelairienne. Le poète dépoétisé du Grand Miroir dépose aux pieds de sa mère quelques jours avant de s'en aller dans l'autre monde - hors langage, hors mimétisme - cette école Baudelaire dont peut-être il est fier, mais qu'il se doit de fuir. Imitateurs, ses disciples grèvent de leur singerie son projet d'insatiable solitude. Et pourtant combien de fois s'est-il plaint, avec raison, de ce qu'on ne lui rendait pas justice, de ce qu'on ne le comprenait pas5. Le maître - puisque désormais plusieurs le savent tel - qui abhorre la singerie, a tant souhaité qu'on le comprenne, qu'on l'imite, et devenir lui-même cette hauteur incitant à l'imitation celui qui la contemple ! Le voici qui lance aux élèves de son école, à ceux qu'enfin sa souveraineté féconde, une interdiction d'autant plus abrupte que silencieuse, interdiction de l'imiter. On dirait la double injonction contradictoire qu'il a reçue, enfant, de son beau-père. Celui-ci lui disait simultanément de copier la violence militaire donnant pouvoir sur la mère, et de ne pas demander ce pouvoir. La réponse baudelairienne a été le compromis de l'écriture - cette violence compromise -, dans l'ambivalence des métaphores militaires et de la violence contre elles, dans l'identification au soldat et la haine du militarisme. Maintenant dépoétisé - démilitarisé - et c'est après la mort de son beau-père, quand il est enfin seul dans l'amour de sa mère -, il sait que son chemin d'humiliations, de sacrifices, le désigne pour guide à de nouvelles recrues. Mais son orgueil est plus grand que celui du Général Aupick, et plus grand que celui de Hugo. Maintenant obtenue la justice d'être imité, il se détourne de ses suiveurs, les conjure de ne pas le suivre. Sa gloire ne se partage pas, cette hauteur est imprenable. L'école Baudelaire existera, plus grande que les corporations belges - toute la modernité poétique ! -, mais sans Baudelaire qui s'y refuse. Une église naît sur le cadavre de son Dieu qui s'absente. Comment former des imitateurs en leur demeurant inimitable, accéder au désirable que l'inaccessibilité mesure, être et en même temps n'être pas ? Baudelaire trouve : l'aphasie - et l'aphasie trouve Baudelaire. Se refuser aux disciples, mais d'un refus qui les discipline ; se séparer d'eux, pour être enfin compris ; être très haut pour ne plus avoir à singer la hauteur, et pour désoler la singerie. Tel est le rôle de l'aphasie, en quoi Baudelaire est présent et absent. Agonie militaire, où coexistent la violence et l'innocence, le langage et sa victime : O Mort, vieux capitaine, il est temps ! levons l'ancre ! 2. Les derniers mots écrits La dernière lettre que Baudelaire ait écrite de sa main, au retour du dernier voyage à Saint-Loup de Namur, est adressée à sa mère. Maintenant l'enfant est réellement Vin-fans. On hésite toujours devant cette proposition spirituelle qu'est la fin de Baudelaire entre l'entendre comme parole, origine du sens, ou comme ultime contrefaçon, dans l'orgueil et l'idolâtrie impuissante du langage. Cet enfant qui n'écrira ni ne parlera plus reprend encore sa mère et lui reproche... une faute d'orthographe : Pauvre chère petite mère, c'est moi qui suis cause que tu as été inquiète (avec un seul T). L'orthographe a si souvent varié en France, que tu peux bien, d'ailleurs, te permettre quelques petites bizarreries, comme Napoléon et Lamartine. L'aphasie met à mort le langage, comme le faible tyrannise son tyran, comme la victime sacrifie son bourreau. C'est qu'elle adore le langage, comme le Singe sacralise la hauteur, ou le disciple l'obstacle qui le modèle. L'oubli final des mots aura été déterminé par leur culte. Est-ce celui-ci qu'exprime, dans cette dernière lettre écrite, la rectification, obstinée, de la maternelle orthographe? passion de la forme correcte. Religion des signes. Sacrifice de l'existence aux lois de la langue, - ou de la langue à la réalité de la mort ? Mon cour mis à nu : Je mettrai l'orthographe même sous la main du bourreau. Dans « Délires I », troisième section d'Une Saison en Enfer, Rimbaud écrit : « Je ne sais même plus parler » ; et dans « Matin », la phrase est soulignée: «7e ne sais plus parler». Le mutisme rimbaldien, s'il s'oppose à l'angélisme de l'écriture, le fait du dehors, du désert : l'homme qui marche en Afrique n'est plus un poète. Baudelaire est dépoétisé en ce qu'il demeure poète. Aphasique, il reste dans les mots, étouffé par le langage et l'étouffant en lui. Sa critique n'est pas opposition, mais intérieure, et comme telle inépuisable. Son agonie si longue ne dure-t-elle pas dans les désastres de notre histoire, qui la suivent hier et demain ? 3. La langue aux chiens Ici venus, regardons des images. La lettre du 5 mars 1866 était la dernière avant le départ pour le catafalque de Saint-Loup. Peut-être ont-ils plus dé sens que ne leur en supposait leur auteur, ces mots du refus jetés à la religion des disciples : « Pour dire la vérité, ils me font une peur de chien »2. Rapprochons-les d'abord d'autres formules comparables. A Ancelle en décembre 1864, tandis qu'il n'était pas encore question d'école Baudelaire, l'obsession d'un retour à Paris trouvait la même image : Au dernier moment, au moment de partir, - malgré tout le désir que j'éprouve de revoir ma mère, [...] - une terreur m'a pris, - une peur de chien, l'horreur de revoir mon enfer, - [...] Les soulignements sont de Baudelaire, comme la ponctuation panique dont les tirets en cascade, minimes gouffres entre les phrases, rappellent l'emploi qu'en faisait jadis le jeune auteur de La Fanfarlo*. Une peur de chien, donc. Cette lucidité submergée par l'instinct, c'est Baudelaire vaincu parce qui en lui est « Belge ». Et c'est encore à Ancelle - celui-ci s'en rendait-il compte ? - que le mélancolique répète, un peu plus tard : Paris me fait une peur de chien ; mais il faut que j'y aille [...]. On a vu plus haut qu'un chien dans la rue suffisait à terroriser le poète. La remontée ravageante de l'Autre que le moi porte en lui-même, ce coup d'aile par quoi la clairvoyance cède la place à l'imbécillité, reflète la victoire des autres réels, hommes et animaux confondus, tous les passants de Bruxelles et de partout. Double sens du complément de nom. La peur devant Paris et les disciples est celle que Baudelaire ressent : qu'éprouve en lui la bête - ou la bêtise - incontrôlée par l'esprit, et celle aussi que lui fait la canaille universelle, à savoir n'importe qui2. Les ambivalences sont lourdes ici encore. Voici bientôt deux ans que la satire et l'injure aspirent l'énergie et interdisent tout autre effort, or Baudelaire dans son premier essai sur Gautier - comment l'aurait-il oublié ? - avait écrit ceci, qu'on a déjà rencontré : « On oublie à chaque instant qu'injurier une foule, c'est s'encanailler soi-même »3. Le Diable fait toujours bien ce qu'il fait : la satire retombe sur le satyre qui l'entreprend, qui s'encanaille dans « ce chien de pays »4, et Baudelaire s'angoisse de ce que sa révolte le rend semblable à ce dont il se révolte. Parce que des disciples le suivent désormais comme des chiens - comme le Destin suit la Beauté5 - il pressent qu'il deviendra, c'est sa peur, un « auteur belge », une canaille parmi celles que son cynisme excite. Posons donc une question, sans prétendre y répondre. Au musée de Bruxelles devant le tableau de Rubens : Le Martyre de saint Liévin, cet immense tourbillon de puissances dont il a envié le souffle, mais qu'il a décidé de honnir6, Baudelaire ne s'est-il pas identifié à ce saint qu'on torture, n'a-t-il pas vu, dès le premier regard effaré, son destin, en marche, dans ce supplice le pire dont un poète puisse rêver, et ici sans doute plus exalté que compris par le peintre ? A Liévin, dont le manteau est brodé d'images ', dont la toque d'or est tombée à terre2, d'énormes hommes du Nord - Belges selon l'exilé - arrachent la langue. Et la jettent - on la voit rouge comme un reflet du turban du bourreau - à des chiens qu'un enfant rieur enrage3 : deux chiens dans l'axe de deux anges. La possibilité et le sens de la question viennent des lettres du 5 puis du 6 février 1866, où Baudelaire malade rend compte du diagnostic de son médecin et feint de s'en moquer. A Asselineau, le grand ami qui pourrait comprendre : - Le mal persiste. Et le médecin a prononcé le grand mot : hystérie. En bon français : je jette ma langue aux chiens. A sa mère, dont il est sûr qu'elle garde ses lettres : Le médecin a lâché le mot : hystérie. Cela veut dire : je jette ma langue aux chiens. Jeter sa langue aux chiens est certes une expression de la langue commune, que le critique a déjà utilisée dans Edgar Allan Poe, Sa vie et ses ouvrages, au sujet de L'Assassinat de la rue Morgue : « Il y a dans cette affaire des faits inexplicables et contradictoires. La police jette sa langue aux chiens ». Mais quand bien même cette expression n'est pas tout à fait rare, elle est saisissante. En outre voici les derniers mots du résumé baudelairien du récit d'Edgar Poe : « c'est un singe qui a fait lo crime ». Est-ce surinterpréter que de rassembler sous le signe du tableau de Rubens la « peur de chien » que font à Baudelaire ses disciples, et cette « langue aux chiens » par quoi il essaie de relativiser - mais en vérité aggrave - l'opinion accablante de son médecin ? Rappelons que s'il est vrai, à cette époque d'avant les résultats de Charcot, que le mot hystérie est employé sans véritable contenu scientifique pour toute maladie nerveuse, et surtout pour recouvrir l'incompréhension de la médecine devant les névroses, tout de même Baudelaire, lecteur de Briquet, souvent y a eu recours, jusque dans ses poèmes6. De sorte que sa contestation du diagnostic, bien qu'elle soit historiquement légitime, ne le réconforte certainement pas. Privée d'assurance intérieure, cette ironie est moins fondée que le diagnostic lui-même. Relisons l'essai sur Madame Bovary, où la question de l'hystérie conduit à proposer un programme littéraire : Madame Bovary substituait dans son âme au Dieu véritable le Dieu de sa fantaisie [...] - voilà le poète hystérique. L'hystérie! Pourquoi ce mystère physiologique ne ferait-il pas le fond et le tuf d'une ouvre littéraire [...] ? Les écrits de Bruxelles, dira-t-on, réalisent ce programme. D'autant que l'un des rares poème composés en Belgique (et le seul publié dans une revue belgE), « Les Bons Chiens », inspiré d'un tableau de Joseph Stevens, décrit - c'est troublant - encore deux chiens : qui surveillent, avec une attention de sorciers, l'ouvre sans nom qui mitonne sur le poêle allumé. L'ouvre sans nom : c'est Baudelaire qui souligne cette métaphore stupéfiante, désignant un miroton. Il ne fait pas de doute qu'il se souvient ici de la scène oraculaire de Macbeth, dans laquelle le criminel craintif et impatient de mourir (guerrier insomniaque, singe du pouvoir, mélancolique sans héritieR), qui avait demandé aux sorcières (« une attention de sorciers », dit le textE) quel mystérieux avenir elles préparaient dans leur chaudron nocturne, eut à entendre - sorcellerie combien évocatoire - leur réponse sans recours : « A deed without a name »3. L'ouvre sans nom : sans titre, innommable, infâme, et bientôt sans auteur, quand celui-ci aura perdu ou jeté sa langue, que s'apprêtent à dévorer les chiens. La convergence des indices est assez flagrante pour autoriser quelques suppositions. La première est que la haine, despotique, pour le Rubens des grands tableaux découverts à Bruxelles, quelque complexe et riche de contradictions qu'elle soit5, repose beaucoup sur ceci, que Baudelaire s'est reconnu dans le martyre du saint, a identifié sa dépoétisation à cet arrachement de la langue, a associé la perte de ses facultés poétiques à la scène sacrificielle qu'a illustrée le peintre. Lequel, trop comblé de pouvoirs, n'a fait de ce supplice, que de la Beauté. Et du coup une deuxième hypothèse est que Baudelaire en a voulu à Rubens de cette Beauté même ; lui a refusé le droit d'édifier sur la torture d'une aphasie, sur l'opération de l'organe du langage, une ouvre, certes admirable mais en cela fautive, un art somptueux de formes souveraines, employant à ses fins propres le malheur de l'incommunicabilité, exploitant pour de l'esthétique en somme satisfaite, arrogante, la catastrophe par excellence de la poésie - et du poète qui en témoigne à Bruxelles -, ce gouffre de l'interdiction du langage. Liévin va sombrer sous son manteau d'images, muet parmi les chiens repus de cette ouvre sans nom : sa langue tranchée. Et Rubens, qui a cette vision prémonitoire de la fin de Baudelaire, ne sait pas en souffrir, construit ce drame sans le vivre, et se permet, indécent - « goujat » -, d'en cultiver son art. En retour, l'injure lancée à Rubens exaspère sa raison d'être. En s'opposant au peintre parce que celui-ci méconnaît l'opération que son ouvre représente, et emploie, Baudelaire s'oppose à lui-même : il s'opère du poète qui écrivit « Les Phares », où Rubens était premier. La peinture qui n'hésite pas à exhiber, à produire la langue arrachée et jetée aux chiens, et qui ne souffre pas avec la victime ni ne se dénonce dans un acte de compassion, cette peinture est un discours, et de surcroît éloquent : sur la perte de parole. Furieusement, hystériquement, Baudelaire l'insulte. Mais d'une insulte qui l'arrache d'autant à sa propre langue, puisqu'il y perd, avec le premier nommé de ses inspirateurs d'autrefois, une source majeure de sa poétique. Se voir en Liévin et dénoncer Rubens, ces deux gouffres se creusent l'un par l'autre, chacun la cause et l'effet de l'autre. Plus le poète accable - mais en lui-même aussi - le peintre, plus il devient Liévin, et réciproquement. Plus Poesis injurie Pictura - quelle nuit dans l'Occident ! - plus elle accède à la sainteté de la victime, et réciproquement. Sainteté comme violence absolue, aphasie comme redoublement d'invectives. Comment nommer la fin de Charles Baudelaire, qui s'opère, comme Mallarmé dira de Rimbaud, « vivant, de la poésie » ' ? La sanctification vient à la fin comme excès de vengeance, et l'opération de la langue y insulte, y revendique : renaissance du langage. D'où d'autres suppositions également nécessaires. La peur de chien devant Paris, devant l'ardeur des disciples, devant le premier venu et le monde entier, est transposée, sur un mode léger comme une dénégation, par cette image du dernier poème en prose : les chiens du saltimbanque, dans « Les Bons Chiens », convoitent son ouvre sans nom. Verlaine, Mallarmé, « ces jeunes gens », les fils Hugo, les auteurs belges, les auteurs et les Belges, Rubens et toute la race humaine, sont cette canaille et cette bêtise universelles qui vont s'approprier la langue en l'absence du maître. Car celui-ci est parti dans l'autre monde, ou comme dit le poème : « Permettez-moi de vous introduire dans la chambre du saltimbanque absent ». De cette chambre la description suit : « Un lit, en bois peint, sans rideaux, des couvertures traînantes et souillées de punaises, deux chaises de paille » '. Nous reconnaissons le tableau de Stevens2, mais nous devinons aussi la chambre du Grand Miroir telle qu'ont dû la trouver les médecins de Baudelaire. Cette chambre est celle de la dernière écriture, ce lit est celui du malade inguérissable : Cette maladie, est-elle imaginaire ou réelle ? Est-elle devenue réelle après avoir été imaginaire ? Le rôdeur du musée de Bruxelles s'est scandalisé de la force insensible de Rubens et a déserté cette opération magique de l'art, comme le saltimbanque de Stevens a quitté sa chambre. La place est vide. Baudelaire est devenu seul, absolu, en prenant sur lui le martyre de Liévin, en acceptant l'aphasie, en abandonnant sa langue à Verlaine et à Mallarmé, puis par eux à la tradition que ce sacrifice inaugure. Il en a souffert et en a eu peur, mais il en a compris le sens. Les héritiers ont écouté l'ancêtre et décidé après lui que la mort est l'origine de la parole. Mais le singe de la hauteur qui a pensé l'imitation et su que son agonie en serait la conséquence, qui a voulu assumer jusqu'au-delà du langage la logique de son premier orgueil, reste, en cela, le mime inimitable - comme Fancioulle -, la hauteur inaccessible à la tradition qu'il fonde. Exposition universelle (1855) : « L'artiste ne relève que de lui-même. Il ne promet aux siècles à venir que ses propres ouvres. Il ne cautionne que lui-même. Il meurt sans enfants. Il a été son roi, son prêtre et son Dieu » 4. Baudelaire a obtenu que sa place qui demeure vide soit au milieu de notre monde. Son silence est d'un Dieu autant que d'un « Belge », autour duquel les poètes qui l'entendent, ses descendants, bâtissent dans notre histoire la vérité de l'échange. 4. D'un cadavre bavard Au terme de notre écoute des écrits de Bruxelles, comprenons-nous mieux pourquoi Baudelaire reste en Belgique ? Je souffre et je m'ennuie. Et cependant, j'aurais beaucoup d'argent, que je ne partirais pas. Je suis en pénitence, et j'y resterai, jusqu'à ce que les causes de la pénitence disparaissent. Les causes de la pénitence : le péché originel d'où la littérature dérive, l'opération formatrice de l'ouvre, l'abolition de Sara par l'imitation de la hauteur, l'injustice de l'injure pour en extraire un livre sans égal, la violence de l'affirmation du moi par la diffamation des autres, le sacrifice d'autrui à l'art, - disparaîtront avec le langage, quand l'auteur se mettra à la place de ses victimes. Encore faut-il que ce désastre soit long, comme le remords, et qu'il parle, bien que silencieux, et fasse entendre le point de vue des sacrifiés, pourtant indicible. Cette volonté de communiquer l'incommunicable est un mourir retentissant dans lequel le poète dépoétisé, devient enfin Belge. Il était dit dans « Les Hiboux » que l'homme porte toujours le châtiment d'avoir voulu changer de place2. Baudelaire a changé de place pour gagner celle du châtiment, où le langage châtie ses victimes. Un fragment prétendant définir le peuple belge définit cette poétique de l'aphasie : Un cadavre de peuple. Un cadavre bavard, créé par la diplomatie. Baudelaire Belge, enfin celui qui est Belge, enfin celui qui a jeté sa langue, est ce « cadavre bavard », exigé par son ouvre sacrificielle dont il a rejoint le lieu du crime. Silence de mort. La musique elle-même est silencieuse. On danse funèbrement. Construction des mâchoires. Epaisseur de la langue. Sifflement. Prononciation lente et pâteuse. Il se promettait d'écrire sur une prétendue maladresse des Belges à s'exprimer. Cette caricature des « sifflements », des « hurlements », des « beaux langagiers », des « locutions belges », de l'« impuissance de conversation », cette condamnation des « barbares » pour « ne pas savoir le français » ', attestaient et intensifiaient sa sécession d'avec les signes. En vérité il apprenait à se taire, à devenir le Belge, qui n'existe en Belgique et partout que du fait de la langue, étant le condamné, d'où les mots procèdent. Un cadavre bavard, cela signifie : « un je ne sais quoi qui n'a plus de nom dans aucune langue » (selon Bossuet reprenant TertullieN), « ce je ne sais quoi que personne n'a nommé ni défini » (selon le Salon de 18592), mais cela dit ceci : qu'une langue dérive d'un cadavre. Est-ce un hasard si l'un des derniers jurons dont il fût capable, quand il agonisait à Paris où on l'avait transporté comme une chose après son ictus hémiplégique, a été ce « Crénom ! », blasphématoire, d'une rivalité continuée avec Dieu ? Crénom est la forme tronçonnée, jetée aux chiens, opérée, de l'exclamation sacrilège et vulgaire, transgressive et quelconque : Sacré nom de Dieu. Or il avait ironisé, par deux fois, sur le « juron national » de la Belgique, équivalent de Sacré nom de Dieu, parce qu'il s'était agacé de le mal comprendre3. Parole de la victime. Psaume pénitentiel de la modernité sans religion. Dans l'ultime Crénom veillent encore le sacré et le nom : la hauteur et la nomination, le Belge et l'infamie. Ce juron sans fin ni forme - ouvre sans nom - précipite le mort vivant dans la place sans place où sa sainteté et son apostasie coïncident. Par la violence et le remords du Crénom, le Dieu de l'hérésie retourné en Belge et le Dieu à naître de la compassion sacrifiée, s'embrassent-ils? Par le rien du Crénom, Baudelaire en nous reçoit-il la grâce de communiquer l'incommunicable, et de communier à la parole de l'Autre ? Dans Le Peintre de la vie moderne, il avait écrit de la femme : « cet être terrible et incommunicable comme Dieu ». De même dans ce fragment belge : Le Belge vous est incommunicable, comme la femme le drame baudelairien, celui de la grande poésie moderne, est dit. Drame de l'échange manqué, de la rencontre perdue, du dialogue refusé. L'aphasie indique aux héritiers de Baudelaire leur risque, mais leur devoir. Par elle, sans doute, le gouffre infranchissable, qui fait l'incommunicabilité, reste infranchi '. Mais elle désigne ce gouffre pour lieu de vérité, à la tâche de l'esprit. - Et pour lieu habité par quelqu'un, de sorte que l'échange n'est pas impossible. |
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Charles Baudelaire (1821 - 1867) |
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Portrait de Charles Baudelaire | |||||||||
BiographieCharles Baudelaire, né à Paris en 1821, a six ans lorsqu'il perd son père, un peintre fantasque et cultivé, ancien prêtre assermenté. Sa mère se remarie avec le futur général Aupick, union que l'enfant qui rêve, de Lyon à Paris, au gré des garnisons, en de tristes internats, d'être « tantôt pape, tantôt comédien », accepte mal. Reçu au baccalauréat, tandis que son beau-père est nommé général de br RepÈres biographiques |
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