Charles Baudelaire |
Que m'importe que tu sois sage? Sois belle ! et sois triste ! Les pleurs Ajoutent un charme au visage, Comme le fleuve au paysage ; L'orage rajeunit les fleurs. Je t'aime surtout quand la joie S'enfuit de ton front terrassé; Quand ton cour dans l'horreur se noie; Quand sur ton présent se déploie Le nuage affreux du passé. Je t'aime quand ton grand oil verse Une eau chaude comme le sang; Quand, malgré ma main qui te berce, Ton angoisse, trop lourde, perce Comme un râle d'agonisant. J'aspire, volupté divine ! Hvmne profond, délicieux! Tous les sanglots de ta poitrine, Et crois que ton cour s'illumine Des perles que versent tes yeux! II Je sais que ton cour, qui regorge De vieux amours déracinés, Flamboie encor comme une forge, Et que tu couves sous ta gorge Un peu de l'orgueil des damnés; Mais tant, ma chère, que tes rêves N'auront pas reflété l'Enfer, Et qu'en un cauchemar sans trêves, Songeant de poisons et de glaives, Eprise de poudre et de fer, N'ouvrant à chacun qu'avec crainte, Déchiffrant le malheur partout, Te convulsant quand l'heure tinte, Tu n'auras pas senti l'étreinte De l'irrésistible Dégoût, Tu ne pourras, esclave reine Qui ne m'aimes qu'avec effroi, Dans l'horreur de la nuit malsaine Me dire, l'âme de cris pleine : « Je suis ton égale, ô mon Roi ! » |
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Charles Baudelaire (1821 - 1867) |
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Portrait de Charles Baudelaire | |||||||||
BiographieCharles Baudelaire, né à Paris en 1821, a six ans lorsqu'il perd son père, un peintre fantasque et cultivé, ancien prêtre assermenté. Sa mère se remarie avec le futur général Aupick, union que l'enfant qui rêve, de Lyon à Paris, au gré des garnisons, en de tristes internats, d'être « tantôt pape, tantôt comédien », accepte mal. Reçu au baccalauréat, tandis que son beau-père est nommé général de br RepÈres biographiques |
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