Clément Marot |
Ne pense pas, très gente damoisellc, Ne pense pas que l'amour et vrai zèle Que te portons jamais finisse et meure Pour ta trop longue et fâcheuse demeure. Fâcheuse est-elle au moins en nos endroits. Mais ores quand quarante ans te tiendrais Loin de nos yeux, si aurait-on (pour voir) Records de toi et deuil de ne te voir : Car le long temps ne l'absence lointaine Vaincre ne peut l'amour vraie et certaine. Si t'avisons, notre Amie très chère, Que par-deçà ne se fait bonne chère, Que de t'avoir on ne fasse un souhait. Si l'un s'en rit, si l'autre est à son hait, Si l'un s'ébat, si l'autre se récrée, Sitôt qu'on tient propos qui nous agrée, Tant que le cour de plaisir nous sautclle, « Plût or à Dieu (ce dit l'un) qu'une telle Fût or ici. » L'autre dit : « Plût à Dieu Qu'un ange l'eût transportée en ce lieu. - Mais plût à Dieu (dit l'autre) que Astarot ' L'apportât saine, aussitôt qu'un garrot. » Voilà comment, pour ta fort bonne grâce, Il n'y a cil qui son souhait ne face D'être avec toi : et ne pouvons savoir I ourquoi ne viens tes amis deçà voir. Le chemin n'est ni fâcheux, ni crotté ; En moins d'avoir dit un Obsecro te, En nos quartiers tu serais arrivée : Pourquoi donc es de nous ainsi privée ? Possible n'est que bien t'excuser susses. Bref, nous voudrions qu'aussi haut voler pusses Que le haut mont d'Olympe ou Parnassus ; Ou qu'eusses or le cheval Pégasus , Qui te portât volant par les provinces ; Ou qu'à présent à ton vouloir tu tinsses Par le licol, par queue, ou par collet Le bon cheval du gentil Pacollet; Ou que de là jusque ici courût eau, Que biche, ou cerf, que le Roi chassa oneques ; Ou que de là jusque ici courrût eau, Qui devers nous te menât en bateau. Lors n'aurais-tu bonne excuse jamais, Mais saurait-on si en oubli tu mets Les tiens Amis. Car adonc ne tiendrait, Fors seulement au bon vouloir et droit, Et à l'amour, qui aux gens donne soin De venir voir les Amis au besoin ; Quoiqu'envers toi n'avons peur qu'elle faille, Mais prions Dieu qu'excuse te défaille, Afin qu'amour, qui onc ne te laissa, A nos désirs t'amène par-deçà. |
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Clément Marot (1496 - 1544) |
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Portrait de Clément Marot | |||||||||
BiographieClément Marot naquit à Cahors en 1496. Son père, grand poète rhétoriqueur, avait été le protégé d'Anne de Bretagne , femme de Louis XII. Page dès 1515, il se mêle à la joyeuse confrérie des Clercs de la Basoche, compose en 1515 le poème allégorique le Temple de Cupido et devient valet de chambre et secrétaire de Marguerite, duchesse d'Alençon, sour du roi. Il rencontre chez elle des penseurs réfo ChronologieÉvénements historiquesOrientation bibliographique |
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