Clément Marot |
(...) Car environ de ce divin pourpris Y soupirait le doux vent Zephyrus, Et y chantait le gaillard Tityrus. Le grand dieu Pan, avec ses pastoureaux, Gardant brebis, boufs, vaches et taureaux. Faisait sonner chalumeaux, cornemuses, Et flageolets, pour éveiller les muses. Nymphes des bois, et déesses hautaines, Suivant jardins, bois, fleuves et fontaines ; Les oiselets par grand'joie et déduit, De leurs gosiers répondent à tel bruit. Tous arbres sont en ce lieu verdoyants. Petits ruisseaux y furent ondoyants. Toujours faisant, autour des prés herbus, Un doux murmure ; et quand le clair Phébus, Avait droit là ses beaux rayons épars, Telle splendeur rendait de toutes parts Ce lieu divin, qu'aux humains bien semblait Que terre au ciel de beauté ressemblait. (...) Ce temple était, un clos fleuri verger, Passant en tout le val délicieux Auquel jadis Paris, jeune berger, Pria d'amour Pégasis aux beaux yeux. Car bien semblait que du plus haut des deux Jupiter fût venu au mortel être. Pour le construire et le faire tel être, Tant reluisait en exquise beauté. Bref, on l'eût pris pour Paradis terrestre, S'Eve et Adam dedans eussent été. (...) Lors mille oiseaux d'une longue ramée, Vinrent voler sur ces vertes courtines, Prêts de chanter chansonnettes divines. Si demandai pourquoi là sont venus : Mais on me dit : « Ami, ce sont matines Qu'ils viennent dire en l'honneur de Vénus. » (...) Les fons du temple étaient une fontaine, Où décourait un ruisseau argentin. Là se baignait mainte dame hautaine Le corps tout nu, montrant un dur tétin. (...) Et bref, je ne saurais bien dire, Si c'est Enfer ou Paradis. Mais, par comparaison, je dis, Que celui temple est une rose, D'épines et ronces enclose : Petits plaisirs, longues clamours1. Or tâchons à trouver la chose Que je cherche au temple d'Amours. (...) Longtemps y a que la cherche et poursuis, Et, qui pis est, en la terre où je suis, Je ne vois rien qui me donne assurance, Que son gent corps y fasse demeurance. (...) Par quoi conclus en autre par tirer2, Et de la nef soudain me retirer, Pour rencontrer la dame tant illustre Celle de qui jadis le très cher lustre3 Soûlait chasser toute obscure souffrance, Faisant régner paix divine sous France ; Celle pour vrai, sans le blâme d'aucun, Qui de deux cours maintes fois n'en fait qu'un ; Celle par qui, Christ, qui souffrit moleste, Laissa jadis le haut trône céleste, Et habita cette basse vallée. Pour retirer Nature maculée De la prison infernale et obscure. (...) Lors Bel Accueil m'a le buisson ouvert Du chour du temple, étant un pré tout vert ; Si merciai Cupidon par mérites. Et saluai Vénus et ses charités. Puis Ferme Amour, après le mien salut, Tel me trouva, que de son gré, voulut Me retirer dessous ses étendards, Dont je me tins de tous pauvres soudards Le plus heureux, puis lui contai comment. Pour son amour continuellement J'ai circuit mainte contrée étrange. Et que souvent je l'ai pensé être ange, Ou résider en la cour célestine. Dont elle prit très sacrée origine. Puis l'avertis comme en la nef du temple De Cupidon, combien qu'elle soit ample, N'ai su trouver sa très noble facture, Mais qu'à la fin suis venu d'aventure Dedans le chour, où est sa mansion.4 Par quoi conclus en mon invention. Que Ferme Amour est au cour éprouvée, Dire le puis, car je l'y ai trouvé. |
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Clément Marot (1496 - 1544) |
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Portrait de Clément Marot | |||||||||
BiographieClément Marot naquit à Cahors en 1496. Son père, grand poète rhétoriqueur, avait été le protégé d'Anne de Bretagne , femme de Louis XII. Page dès 1515, il se mêle à la joyeuse confrérie des Clercs de la Basoche, compose en 1515 le poème allégorique le Temple de Cupido et devient valet de chambre et secrétaire de Marguerite, duchesse d'Alençon, sour du roi. Il rencontre chez elle des penseurs réfo ChronologieÉvénements historiquesOrientation bibliographique |
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