Henri Michaux |
Là les malfaiteurs, pris en flagrant délit, ont le visage arraché sur-le-champ. Le Mage bourreau aussitôt arrive. Il faut une incroyable force de volonté pour sortir un visage, habitué comme il est à son homme. Petit à petit, la figure lâche, vient. Le bourreau redouble d'efforts, s'arc-boute, respire puissamment. Enfin, il l'arrache. L'opération étant bien faite, l'ensemble se détache, front, yeux, joues, tout le devant de la tête comme nettoyé par je ne sais quelle corrosive éponge. Un sang dru et sombre sourd des pores partout généreusement ouverts. Le lendemain, un énorme, rond caillot croû-teux s'est formé, qui ne peut inspirer que l'épouvante. Qui en a vu un se le rappelle à jamais. Il a ses cauchemars pour se le rappeler. Si l'opération n'est pas bien faite, le malfaiteur étant particulièrement robuste, on n'arrive à lui arracher que le nez et les yeux. C'est déjà un résultat, l'arrachage étant purement magique, les doigts du bourreau ne pouvant en effet toucher ni seulement effleurer la figure à retirer. Mis au centre d'arènes parfaitement vides, le prévenu est questionné. Par voie occulte. Dans un profond silence, mais puissamment pour lui, la question résonne. Répercutée par les gradins, elle rebondit, revient, retombe et se rabat sur sa tête comme ville qui s'écroule. Sous ces ondes pressantes, comparables seulement à des catastrophes successives, il perd toute résistance et confesse son crime. Il ne peut pas ne pas avouer. Assourdi, devenu une loque, la tête douloureuse et sonnante, avec la sensation d'avoir eu affaire à dix mille accusateurs, il quitte les arènes, où ne cessa de régner le plus absolu silence. |
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Henri Michaux (1899 - 1984) |
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Portrait de Henri Michaux | |||||||||
BibliographieEn 1922, lors de son séjour à l'hôpital consécutif à ces problèmes cardiaques, il découvre Lautréamont, dont l'oeuvre lui donne la liberté et l'étincelle créative pour écrire ses propres poèmes. « Cas de folie circulaire », fut son premier poème publié en 1922 dans la revue littéraire Le Disque Vert, dirigée par Franz Hellens. Celui-ci, fervent amateur de Michaux, ira jusqu'à le nommer co-directeu Ouvres d'henri michauxHenri Michaux (Namur, 24 mai 1899 - Paris, 19 octobre 1984) est un écrivain, poète et peintre d'origine belge d'expression française naturalisé français en 1955. Son ouvre est souvent rattachée au courant surréaliste, même s'il n'a pas fait partie du mouvement. BiographieNé le 24 mai 1899 à Namur, Henri Michaux arrive en 1924 à Paris où il côtoie les peintres surréalistes et se lie d'amitié avec Jules Supervielle et le peintre Zao Wou KI. Après avoir longuement voyagé de 1927 à 1937 en Asie et en Amérique du Sud, il se retire dans le Midi durant la guerre. Il est mort à Paris le 19 octobre 1984. Si la mescaline est en grande partie à l'origine de son ouvre pictura |
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