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Jules Laforgue



Complainte d'un certain dimanche - Poéme


Poéme / Poémes d'Jules Laforgue





L'homme n'est pas méchant, ni la femme éphémère.

Ah ! fous dont au casino battent les talons,

Tout homme pleure un jour et toute femme est mère,

Nous sommes tous filials, allons !
Mais quoi ! les
Destins ont des partis pris si tristes,
Qui font que, les uns loin des autres, l'on s'exile,
Qu'on se traite à tort et à travers d'égoïstes,
Et qu'on s'use à trouver quelque unique
Evangile.
Ah ! jusqu'à ce que la nature soit bien bonne,

Moi je veux vivre monotone

Dans ce village en falaises, loin, vers les cloches.

Je redescends dévisagé par les enfants

Qui s'en vont faire bénir de tièdes brioches ;

Et rentré, mon sacré-cour se fend !
Les moineaux des vieux toits pépient à ma fenêtre.
Ils me regardent dîner, sans faim, à la carte ;
Des âmes d'amis morts les habitent peut-être ?
Je leur jette du pain : comme blessés, ils partent !
Ah ! jusqu'à ce que la nature soit bien bonne,

Moi je veux vivre monotone.

Elle est partie hier.
Suis-je pas triste d'elle ?

Mais c'est vrai !
Voilà donc le fond de mon chagrin !

Oh ! ma vie est aux plis de ta jupe fidèle !

Son mouchoir me flottait sur le
Rhin...
Seul. -
Le couchant retient un moment son
Quadrige
En rayons où le ballet des moucherons danse,
Puis, vers les toits fumants de la soupe, il s'afflige...
Et c'est le
Soir, l'insaisissable confidence...
Ah ! jusqu'à ce que la nature soit bien bonne,

Faudra-l-il vivre monotone ?

Que d'yeux, en éventail, en ogive, ou d'inceste.
Depuis que l'Être espère, ont réclamé leurs droits !
O ciels, les yeux pourrissent-ils comme le reste ?

Oh ! qu'il fait seul ! oh ! fait-il froid !
Oh ! que d'après-midi d'automne à vivre encore !
Le
Spleen, eunuque à froid, sur nos rêves se vautre.
Or, ne pouvant redevenir des madrépores,
O mes humains, consolons-nous les uns les autres.
Et jusqu'à ce que la nature soit bien bonne,

Tâchons de vivre monotone.

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Jules Laforgue
(1860 - 1887)
 
  Jules Laforgue - Portrait  
 
Portrait de Jules Laforgue

Biographie jules laforgue

«Pendant une période de vie très modeste dans sa famille, vie devenue dure avec les soucis d'argent, Jules Laforgue, né à Montevideo, en 1860, sentit s'éveiller son esprit aux chefs-d'ouvres des Musées de Paris et aux longues lectures dans le jardin du Luxembourg; il aima d'abord Taine, Renan, Huysmans, puis alla vers Bourget, dont l'analyse inquiète et naïve l'attirait. Son ambition de la vingtiè

Orientation bibliographique / Ouvres

L'art de Laforgue occupe une place unique dans la poésie française. En effet, on retrouve chez lui une fusion rare entre l'expression de la mélancolie la plus vive et un ton ironique, parfois trivial (comme dans La Chanson du petit hypertrophique) qui, sous d'autres plumes, serait tombé dans le prosaïsme. Parfois aussi, lorsque Laforgue évoque des sujets aussi graves que la question du libre arbit

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