Jules Laforgue |
On ne voyait pas la mer, par ce temps d'embruns, Mais on l'entendait maudire son existence, « Oh ! beuglait-elle, qu'il fût seulement Quelqu'un ! »... Et elle vous brisait maint bateau pas-de-chance. Et, ne pouvant mordre le steamer, les autans Mettaient nos beaux panaches de fumée en loques ! Et l'Homme renvoyait ses comptes à des temps Plus clairs, sifflotant : « Cet univers se moque, « Il raille ! Et qu'il me dise où l'on voit Mon Pareil ! « Allez, boudez, chez vos parades sidérales, « Infini ! Un temps viendra que l'Homme, fou d'éveil, « Fera pour les Pays Terre-à-Terre ses malles ! « Il crut à l'Idéal ! Ah ! milieux détraquants « Et bazars d'oripeaux ! Si c'était à refaire, « Chers madrépores, comme on ficherait le camp « Chez vous ! Oh ! même vers la Période Glaciaire !... « Mais l'Infini est là, gare de trains ratés, « Où les gens, aveuglés de signaux, s'apitoient « Sur le sanglot des convois, et vont se hâter « Tout à l'heure ! et crever en travers de la voie... « -Un fin sourire (tel ce triangle d'oiseaux « D'exil sur ce ciel gris !) peut traverser mes heures ; « Je dirai : passe, oh ! va, ne fais pas de vieux os « Par ici, mais vide au plus tôt cette demeure... » Car la vie est partout la même. On ne sait rien ! Mais c'est la Gare ! et faut chauffer qui pour les fêtes Futures, qui pour les soi-disant temps anciens. Oh ! file ton rouet, et prie et reste honnête. |
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Jules Laforgue (1860 - 1887) |
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Portrait de Jules Laforgue | |||||||||
Biographie jules laforgue«Pendant une période de vie très modeste dans sa famille, vie devenue dure avec les soucis d'argent, Jules Laforgue, né à Montevideo, en 1860, sentit s'éveiller son esprit aux chefs-d'ouvres des Musées de Paris et aux longues lectures dans le jardin du Luxembourg; il aima d'abord Taine, Renan, Huysmans, puis alla vers Bourget, dont l'analyse inquiète et naïve l'attirait. Son ambition de la vingtiè Orientation bibliographique / OuvresL'art de Laforgue occupe une place unique dans la poésie française. En effet, on retrouve chez lui une fusion rare entre l'expression de la mélancolie la plus vive et un ton ironique, parfois trivial (comme dans La Chanson du petit hypertrophique) qui, sous d'autres plumes, serait tombé dans le prosaïsme. Parfois aussi, lorsque Laforgue évoque des sujets aussi graves que la question du libre arbit |
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