Jules Laforgue |
Jupiter, voyant nos fautes. Dit un jour, du haut des airs : « Remplissons de nouveaux hôtes Les cantons de l'univers Habités par cette race Qui m'importune et me lasse. Va-t'en, Mercure, aux Enfers; Amène-moi la Furie La plus cruelle des trois. Race que j'ai trop chérie. Tu périras cette fois. » Jupiter ne tarda guère A modérer son transport. O vous, Rois, qu'il voulut faire Arbitres de notre sort, Laissez, entre la colère Et l'orage qui la suit, L'intervalle d'une nuit. Le Dieu dont l'aile est légère, Et la langue a des douceurs. Alla voir les noires Sours. A Tisiphone et Mégère Il préféra, ce dit-on. L'impitoyable Alecton. Ce choix la rendit si fière, Qu'elle jura par Pluton Que toute l'engeance humaine Seroit bientôt du domaine Des déités de là-bas. Jupiter n'approuva pas Le serment de l'Euménide. Il la renvoie; et pourtant Il lance un foudre à l'instant Sur certain peuple perfide. Le Tonnerre, ayant pour guide Le père même de ceux Qu'il menaçoit de ses feux, Se contenta de leur crainte; Il n'embrasa que l'enceinte D'un désert inhabité : Tout père frappe à côté. Qu'arriva-t-il? Notre engeance Prit pied sur cette indulgence. Tout l'Olympe s'en plaignit; Et l'assembleur de nuages Jura le Styx, et promit De former d'autres orages : Ils seroient sûrs. On sourit; On lui dit qu'il étoit père. Et qu'il laissât, pour le mieux. A quelqu'un des autres dieux D'autres tonnerres à faire. Vulcain entreprit l'affaire. Ce dieu remplit ses fourneaux De deux sortes de carreaux : . L'un jamais ne se fourvoie; Et c'est celui que toujours L'Olympe en corps nous envoie; L'autre s'écarte en son cours : Ce n'est qu'aux monts qu'il en coûte; Bien souvent même il se perd ; Et ce dernier en sa route Nous vient du seul Jupiter. |
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Jules Laforgue (1860 - 1887) |
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Portrait de Jules Laforgue | |||||||||
Biographie jules laforgue«Pendant une période de vie très modeste dans sa famille, vie devenue dure avec les soucis d'argent, Jules Laforgue, né à Montevideo, en 1860, sentit s'éveiller son esprit aux chefs-d'ouvres des Musées de Paris et aux longues lectures dans le jardin du Luxembourg; il aima d'abord Taine, Renan, Huysmans, puis alla vers Bourget, dont l'analyse inquiète et naïve l'attirait. Son ambition de la vingtiè Orientation bibliographique / OuvresL'art de Laforgue occupe une place unique dans la poésie française. En effet, on retrouve chez lui une fusion rare entre l'expression de la mélancolie la plus vive et un ton ironique, parfois trivial (comme dans La Chanson du petit hypertrophique) qui, sous d'autres plumes, serait tombé dans le prosaïsme. Parfois aussi, lorsque Laforgue évoque des sujets aussi graves que la question du libre arbit |
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