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Jules Laforgue



La cour du lion - Fable


Fable / Poémes d'Jules Laforgue





Sa
Majesté
Lionne un jour voulut connoître
De quelles nations le
Ciel l'avoit fait maître.

Il manda donc par députés

Ses vassaux de toute nature,

Envoyant de tous les côtés

Une circulaire écriture

Avec son sceau.
L'écrit portoit

Qu'un mois durant le
Roi tiendroit

Cour plénière, dont l'ouverture

Devoit être un fort grand festin.

Suivi des tours de
Fagotin.

Par ce trait de magnificence
Le
Prince à ses sujets étaloit sa puissance.

En son
Louvre il les invita.
Quel
Louvre! un vrai charnier, dont l'odeur se porta



D'abord au nez des gens.
L'Ours boucha sa narine :

Il se fût bien passé de faire cette mine;

Sa grimace déplut : le
Monarque irrite

L'envoya chez
Pluton faire le dégoûté.

Le
Singe approuva fort cette sévérité,

Et flatteur excessif, il loua la colère

Et la griffe du
Prince, et l'antre, et cette odeur :

Il n'étoit ambre, il n'étoit fleur
Qui ne lût ail au prix.
Sa sotte flatterie
Eut un mauvais succès, et fut encor punie :

Ce
Monseigneur du
Lion-là

Fut parent de
Caligula.
Le
Renard étant proche : «
Or çà, lui dit le
Sire,
Que sens-tu? dis-le-moi : parle sans déguiser. »

L'autre aussitôt de s'excuser,
Alléguant un grand rhume : il ne pouvoit que dire

Sans odorat.
Bref, il s'en tire.

Ceci vous sert d'enseignement :
Ne soyez à la cour, si vous voulez y plaire.
Ni fade adulateur, ni parleur trop sincère,
Et tâchez quelquefois de répondre en
Normand.

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Jules Laforgue
(1860 - 1887)
 
  Jules Laforgue - Portrait  
 
Portrait de Jules Laforgue

Biographie jules laforgue

«Pendant une période de vie très modeste dans sa famille, vie devenue dure avec les soucis d'argent, Jules Laforgue, né à Montevideo, en 1860, sentit s'éveiller son esprit aux chefs-d'ouvres des Musées de Paris et aux longues lectures dans le jardin du Luxembourg; il aima d'abord Taine, Renan, Huysmans, puis alla vers Bourget, dont l'analyse inquiète et naïve l'attirait. Son ambition de la vingtiè

Orientation bibliographique / Ouvres

L'art de Laforgue occupe une place unique dans la poésie française. En effet, on retrouve chez lui une fusion rare entre l'expression de la mélancolie la plus vive et un ton ironique, parfois trivial (comme dans La Chanson du petit hypertrophique) qui, sous d'autres plumes, serait tombé dans le prosaïsme. Parfois aussi, lorsque Laforgue évoque des sujets aussi graves que la question du libre arbit

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