Jules Laforgue |
Le serpent a deux parties Du genre humain ennemies. Tête et Queue; et toutes deux Ont acquis un nom fameux Auprès des Parques cruelles : Si bien qu'autrefois entre elles Il survint de grands débats Pour le pas. La Tête avoit toujours marché devant la Queue. La Queue au Ciel se plaignit. Et lui dit : « Je fais mainte et mainte lieue Comme il plaît à celle-ci : Croit-elle que toujours j'en veuille user ainsi? Je suis son humble servante. On m'a faite, Dieu merci, Sa sour et non sa suivante. Toutes deux de même sang, Traitez-nous de même sorte : Aussi bien qu'elle je porte Un poison prompt et puissant. Enfin voilà ma requête : C'est à vous de commander, Qu'on me laisse précéder A mon tour ma sour la Tète. Je la conduirai si bien Qu'on ne se plaindra de rien. » Le Ciel eut pour ces voux une bonté cruelle. Souvent sa complaisance a de méchants effets. Il devroit être sourd aux aveugles souhaits. Il ne le fut pas lors; et la guide nouvelle. Qui ne voyoit, au grand jour, Pas plus clair que dans un four, Donnoit tantôt contre un marbre. Contre un passant, contre un arbre : Droit aux ondes du Styx elle mena sa sour. Malheureux les États tombés dans son erreur! |
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Jules Laforgue (1860 - 1887) |
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Portrait de Jules Laforgue | |||||||||
Biographie jules laforgue«Pendant une période de vie très modeste dans sa famille, vie devenue dure avec les soucis d'argent, Jules Laforgue, né à Montevideo, en 1860, sentit s'éveiller son esprit aux chefs-d'ouvres des Musées de Paris et aux longues lectures dans le jardin du Luxembourg; il aima d'abord Taine, Renan, Huysmans, puis alla vers Bourget, dont l'analyse inquiète et naïve l'attirait. Son ambition de la vingtiè Orientation bibliographique / OuvresL'art de Laforgue occupe une place unique dans la poésie française. En effet, on retrouve chez lui une fusion rare entre l'expression de la mélancolie la plus vive et un ton ironique, parfois trivial (comme dans La Chanson du petit hypertrophique) qui, sous d'autres plumes, serait tombé dans le prosaïsme. Parfois aussi, lorsque Laforgue évoque des sujets aussi graves que la question du libre arbit |
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