Jules Laforgue |
Sur la branche d'un arbre étoit en sentinelle Un vieux Coq adroit et matois. « Frère, dit un Renard, adoucissant sa voix, Nous ne sommes plus en querelle. Paix générale cette fois. Je viens te l'annoncer; descends, que je t'embrasse. Ne me retarde point, de grâce; Je dois faire aujourd'hui vingt postes sans manquer. Les tiens et toi pouvez vaquer. Sans nulle crainte, à vos affaires; Nous vous y servirons en frères. Faites-en les feux dès ce soir, Et cependant viens recevoir Le baiser d'amour fraternelle. - Ami, reprit le Coq, je ne pouvois jamais Apprendre une plus douce et meilleure nouvelle Que celle De cette paix; Et ce m'est une double joie De la tenir de toi. Je vois deux Lévrier's, Qui, je m'assure, sont courriers Que pour ce sujet on envoie ; Ils vont vite, et seront dans un moment à nous. Je descends : nous pourrons nous entre-baiser tous. - Adieu, dit le Renard, ma traite est longue à faire Nous nous réjouirons du succès de l'affaire Une autre fois. » Le galand aussitôt Tire ses grègues, gagne au haut, Mal content de son stratagème. Et notre vieux Coq en soi-même Se mit à rire de sa peur; Car c'est double plaisir de tromper le trompeur. |
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Jules Laforgue (1860 - 1887) |
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Portrait de Jules Laforgue | |||||||||
Biographie jules laforgue«Pendant une période de vie très modeste dans sa famille, vie devenue dure avec les soucis d'argent, Jules Laforgue, né à Montevideo, en 1860, sentit s'éveiller son esprit aux chefs-d'ouvres des Musées de Paris et aux longues lectures dans le jardin du Luxembourg; il aima d'abord Taine, Renan, Huysmans, puis alla vers Bourget, dont l'analyse inquiète et naïve l'attirait. Son ambition de la vingtiè Orientation bibliographique / OuvresL'art de Laforgue occupe une place unique dans la poésie française. En effet, on retrouve chez lui une fusion rare entre l'expression de la mélancolie la plus vive et un ton ironique, parfois trivial (comme dans La Chanson du petit hypertrophique) qui, sous d'autres plumes, serait tombé dans le prosaïsme. Parfois aussi, lorsque Laforgue évoque des sujets aussi graves que la question du libre arbit |
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