Jules Laforgue |
Compère le Renard se mit un jour en frais. Et retint à dîner commère la Cicogne. Le régal fut petit et sans beaucoup d'apprêts : Le galand, pour toute besogne, Avoit un brouet clair; il vivoit chichement. Ce brouet fut par lui servi sur une assiette : La Cicogne au long bec n'en put attraper miette; Et le drôle eut lapé le tout en un moment. Pour se venger de cette tromperie, A quelque temps de là, la Cicogne le prie. « Volontiers, lui dit-il; car avec mes amis Je ne fais point cérémonie. » A l'heure dite, il courut au logis De la Cicogne son hôtesse; Loua très-fort la politesse; Trouva le dîner cuit à point : Bon appétit surtout; renards n'en manquent point. Il se réjouissoit à l'odeur de la viande Mise en menus morceaux, et qu'il croyoit friande. On servit, pour l'embarrasser, En un vase à long col et d'étroite embouchure. Le bec de la Cicogne y pouvoit bien passer; Mais le museau du sire étoit d'autre mesure. Il lui fallut à jeun retourner au logis, Honteux comme un renard qu'une poule auroit pris. Serrant la queue, et portant bas l'oreille. Trompeurs, c'est pour vous que j'écris : Attendez-vous à la pareille. |
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Jules Laforgue (1860 - 1887) |
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Portrait de Jules Laforgue | |||||||||
Biographie jules laforgue«Pendant une période de vie très modeste dans sa famille, vie devenue dure avec les soucis d'argent, Jules Laforgue, né à Montevideo, en 1860, sentit s'éveiller son esprit aux chefs-d'ouvres des Musées de Paris et aux longues lectures dans le jardin du Luxembourg; il aima d'abord Taine, Renan, Huysmans, puis alla vers Bourget, dont l'analyse inquiète et naïve l'attirait. Son ambition de la vingtiè Orientation bibliographique / OuvresL'art de Laforgue occupe une place unique dans la poésie française. En effet, on retrouve chez lui une fusion rare entre l'expression de la mélancolie la plus vive et un ton ironique, parfois trivial (comme dans La Chanson du petit hypertrophique) qui, sous d'autres plumes, serait tombé dans le prosaïsme. Parfois aussi, lorsque Laforgue évoque des sujets aussi graves que la question du libre arbit |
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