Jules Laforgue |
Ô paria ! - Et revoici les sympathies de mai. Mais tu ne peux que te répéter, ô honte ! Et tu te gonfles et ne crèves jamais. Et tu sais fort bien, ô paria, Que ce n'est pas du tout ça. Oh ! que Devinant l'instant le plus seul de la nature. Ma mélodie, toute et unique, monte. Dans le soir et redouble, et fasse tout ce qu'elle peut Et dise la chose qu'est la chose, Et retombe, et reprenne. Et fasse de la peine, Ô solo de sanglots, Et reprenne et retombe Selon la tâche qui lui incombe. Oh ! que ma musique Se crucifie. Selon sa photographie Accoudée et mélancolique !... Il faut trouver d'autres thèmes. Plus mortels et plus suprêmes. Oh ! bien, avec le monde tel quel. Je vais me faire un monde plus mortel ! Les âmes y seront à musique. Et tous les intérêts puérilement charnels, Ô fanfares dans les soirs, Ce sera barbare. Ce sera sans espoir. Enquêtes, enquêtes, Seront l'unique fête ! Qui m'en défie ? J'entasse sur mon lit, les journaux linge sale. Dessins de mode, photographies quelconques, Toute la capitale, Matrice sociale. Que nul n'intercède. Ce ne sera jamais assez. Il n'y a qu'un remède, C'est de tout casser. Ô fanfares dans les soirs ! Ce sera barbare, Ce sera sans espoir. Et nous aurons beau la piétiner à l'envi. Nous ne serons jamais plus cruels que la vie. Qui fait qu'il est des animaux injustement rossés, Et des femmes à jamais laides... Que nul n'intercède. Il faut tout casser. Alléluia, Terre paria. Ce sera sans espoir. De l'aurore au soir. Quand il n'y en aura plus il y en aura encore. Du soir à l'aurore. Alléluia, Terre paria ! Les hommes de l'art Ont dit : « Vrai, c'est trop tard. » Pas de raison. Pour ne pas activer sa crevaison. Aux armes, citoyens ! Il n'y a plus de raison : Il prit froid l'autre automne, S'étant attardé vers les peines des cors. Sur la fin d'un beau jour. Oh ! ce fut pour vos cors, et ce fut pour l'automne, Qu'il nous montra qu'« on meurt d'amour » ! On ne le verra plus aux fêtes nationales, S'enfermer dans l'Histoire et tirer les verrous, Il vint trop tôt, il est reparti sans scandale ; Ô vous qui mécoutez, rentrez chacun chez vous. |
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Jules Laforgue (1860 - 1887) |
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Portrait de Jules Laforgue | |||||||||
Biographie jules laforgue«Pendant une période de vie très modeste dans sa famille, vie devenue dure avec les soucis d'argent, Jules Laforgue, né à Montevideo, en 1860, sentit s'éveiller son esprit aux chefs-d'ouvres des Musées de Paris et aux longues lectures dans le jardin du Luxembourg; il aima d'abord Taine, Renan, Huysmans, puis alla vers Bourget, dont l'analyse inquiète et naïve l'attirait. Son ambition de la vingtiè Orientation bibliographique / OuvresL'art de Laforgue occupe une place unique dans la poésie française. En effet, on retrouve chez lui une fusion rare entre l'expression de la mélancolie la plus vive et un ton ironique, parfois trivial (comme dans La Chanson du petit hypertrophique) qui, sous d'autres plumes, serait tombé dans le prosaïsme. Parfois aussi, lorsque Laforgue évoque des sujets aussi graves que la question du libre arbit |
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