wikipoemes
paul-verlaine

Paul Verlaine

alain-bosquet

Alain Bosquet

jules-laforgue

Jules Laforgue

jacques-prevert

Jacques Prévert

pierre-reverdy

Pierre Reverdy

max-jacob

Max Jacob

clement-marot

Clément Marot

aime-cesaire

Aimé Césaire

henri-michaux

Henri Michaux

victor-hugo

Victor Hugo

robert-desnos

Robert Desnos

blaise-cendrars

Blaise Cendrars

rene-char

René Char

charles-baudelaire

Charles Baudelaire

georges-mogin

Georges Mogin

andree-chedid

Andrée Chedid

guillaume-apollinaire

Guillaume Apollinaire

Louis Aragon

arthur-rimbaud

Arthur Rimbaud

francis-jammes

Francis Jammes


Devenir membre
 
 
auteurs essais
 

Arthur Rimbaud



à georges izambard - Letter


Letter / Poémes d'Arthur Rimbaud





Charleville, 25 août 1870.



Monsieur,



Vous êtes heureux, vous, de ne plus habiter Charleville j - Ma ville natale est supérieurement idiote entre les petites villes de province. Sur cela, voyez-vous, je n'ai plus d'illusions. Parce qu'elle est à côté de Mézières, - une ville qu'on ne trouve pas, - parce qu'elle voit pérégriner dans ses rues deux ou trois cents de pioupious, cette benoîte population gesticule, prudhommesquement spadassine, bien autrement que les assiégés de Metz et de Strasbourg ! C'est effrayant, les épiciers retraités qui revêtent l'uniforme ! C'est épatant, comme ça a du chien, les notaires, les vitriers, les percepteurs, les menuisiers, et tous les ventres, qui, chassepot au cour, font du patrouillotisme aux portes de Mézières ; ma patrie se lève !... Moi, j'aime mieux la voir assise ; ne remuez pas les bottes ! c'est mon principe.

Je suis dépaysé, malade, furieux, bête, renversé ; j'espérais des bains de soleil, des promenades infinies, du repos, des voyages, des aventures, des bohcmienne-ries enfin ; j'espérais surtout des journaux, des livres... Rien ! Rien ! Le courrier n'envoie plus rien aux libraires ; Paris se moque de nous joliment : pas un seul livre nouveau ! c'est la mort ! Me voilà réduit, en fait de journaux, à l'honorable Courrier des Ardennes, - propriétaire, gérant, directeur, rédacteur en chef et rédacteur unique : A. Pouillard ! Ce journal résume les aspirations, les voux et les opinions de la population : ainsi jugez ! c'est du propre !... On est exilé dans sa patrie !!!

Heureusement, j'ai votre chambre : - Vous vous rappelez la permission que vous m'avez donnée. - J'ai emporté la moitié de vos livres ! J'ai pris le Diable à Paris. Dites-moi un peu s'il y a jamais eu quelque chose de plus idiot que les dessins de Grandville ? - J'ai Costal l'Indien, j'ai la Robe de Nessus, deux romans intéressants. Puis, que vous dire ?... J'ai lu tous vos livres, tous ; il y a trois jours, je suis descendu aux Epreuves, puis aux Glaneuses, - oui ! j'ai relu ce volume ! - puis ce fut tout !... Plus rien ; votre bibliothèque, ma dernière planche de salut, était épuisée !... Le Don Quichotte m'apparut ; hier, j'ai passé, deux heures durant, la revue des bois de Doré : maintenant, je n'ai plus rien !

Je vous envoie des vers ; lisez cela un matin, au soleil, comme je les ai faits : vous n'êtes plus professeur, maintenant, j'espère !...

l'air de vouloir connaître Louisa Siefert, quand je vous ai prêté ses derniers vers ; je viens de me procurer des parties de son premier volume de poésies, les Rayons perdus, 4* édition. J'ai là une pièce très émue et fort belle, Marguerite ;



Moi, j'étais à l'écart, tenant sur mes genoux

Ma petite cousine aux grands yeux bleus si doux :

C'est une ravissante enfant que Marguerite

Avec ses cheveux blonds, sa bouche si petite

Et son teint transparent...



Marguerite est trop jeune. Oh ! si c'était ma fille,

Si j'avais une enfant, tête blonde et gentille,

Fragile créature en qui je revivrais,

Rose et candide avec de grands yeux indiscrets !

Des larmes sourdent presque au bord de ma paupière

Quand je pense à l'enfant qui me rendrait sifière,

Et que je n'aurai pas, que je n'aurai jamais;

Car l'avenir, cruel en celui que j'aimais,

De cette enfant aussi veut que je désespère...



Jamais on ne dira de moi : c'est une mère !

Et jamais un enfant ne me dira : maman !

C'en est fini pour moi du céleste roman

Que toute jeune fille à mon âge imagine...



Ma vie, à dix-huit ans, compte tout un passé.



- C'est aussi beau que les plaintes d'Antigone avu|upT), dans Sophocle.

J'ai les Fêtes galantes de Paul Verlaine, un joli in-12 écu. C'est fort bizarre, très drôle ; mais vraiment, c'est adorable. Parfois de fortes licences : ainsi,



Et la tigresse épou - vantable d'Hyrcanie



est un vers de ce volume. Achetez, je vous le conseille, la Bonne Chanson, un petit volume de vers du même poète : ça vient de paraître chez Lemerre ; je ne l'ai pas lu : rien n'arrive ici ; mais plusieurs journaux en disent beaucoup de bien.

Au revoir, envoyez-moi une lettre de 25 pages - poste restante - et bien vite !



A. RIMBAUD



P.S. À bientôt, des révélations sur la vie que je vais mener après... les vacances...

Monsieur Georges Izambard, 29, rue de l'Abbaye-des-Prés, Douai (Nord). Très pressé.

Contact - Membres - Conditions d'utilisation

© WikiPoemes - Droits de reproduction et de diffusion réservés.

Arthur Rimbaud
(1854 - 1891)
 
  Arthur Rimbaud - Portrait  
 
Portrait de Arthur Rimbaud

Biographie

Arthur Rimbaud est né à Charleville-Mézières (dans les Ardennes) le 20 octobre 1854. Sa mère, Vitalie Cuif, est une femme très autoritaire et son père, Frédéric Rimbaud, est militaire.
En octobre 1862, Rimbaud entre à l'Institut Rossat, une école fréquentée par les enfants de la bourgeoisie de Charleville. En 1865, il entre au collège de Charleville et commence à écrire. En 1870, il se lie

Bibliographie

La bibliographie rimbaldienne est considérable. Pour la seule période 1869-1950, dans les 536 pages du premier volume de sa thèse le Mythe de Rimbaud (Genèse du mythe, Paris, Gallimard, 1954 ; rééd. 1968), Étiemblc dénombrait déjà 2 606 livres ou articles, en France ou ailleurs. Pour la période 1968-1990, Yoshimi Yam3guchi, dans un récent numéro « Rimbaud » de la revue japonaise lichiko (n 17, Tok

Cronologie


mobile-img