Arthur Rimbaud |
Jeanne-Marie a des mains fortes. Mains sombres que l'été tanna. Mains pâles comme des mains mortes. - Sont-ce des mains de Juana? Ont-elles pris les crèmes brunes Sur les mares des voluptés? Ont-elles trempé dans des lunes Aux étangs de sérénités? Ont-elles bu des cicux barbares. Calmes sur les genoux charmants? Ont-elles roulé des cigares Ou trafiqué des diamants? Sur les pieds ardents des Madones Ont-elles fané des fleurs d'or? C'est le sang noir des belladones Qui dans leur paume éclate et dort. Mains chasseresses des diptères Dont bombinent les bleuisons** Aurorales, vers les nectaires? Mains décanteuses de poisons? Oh! quel Rêve les a saisies Dans les pandiculations? Un rêve inouï des Asies, Des Khenghavars ou des Sions? - Ces mains n'ont pas vendu d'oranges. Ni bruni sur les pieds des dieux : Ces mains n'ont pas lavé les langes De lourds petits enfants sans yeux. Ce ne sont pas mains de cousine Ni d'ouvrières aux gros fronts Que brûle, aux bois puant l'usine. Un soleil ivre de goudrons. Ce sont des ployeuses*** d'échinés. Des mains qui ne font jamais mal. Plus fatales que des machines. Plus fortes que tout un cheval! Remuant comme des fournaises, Et secouant tous ses frissons. Leur chair chante des Marseillaises Et jamais les Eleisons**** ! Ça serrerait vos cous, ô femmes Mauvaises, ça broierait vos mains, Femmes nobles, vos mains infâmes Pleines de blancs et de carmins. L'éclat de ces mains amoureuses Tourne le crâne des brebis! Dans leurs phalanges savoureuses Le grand soleil met un rubis! Une tache de populace Les brunit comme un sein d'hier; Le dos de ces Mains est la place Qu'en baisa tout Révolté fier! Elles ont pâli, merveilleuses. Au grand soleil d'amour chargé. Sur le bronze des mitrailleuses A travers Paris insurgé! Ah! quelquefois, ô Mains sacrées, A vos poings. Mains où tremblent nos Lèvres jamais désenivrées. Crie une chaîne aux clairs anneaux! Et c'est un soubresaut étrange Dans nos êtres, quand, quelquefois. On veut vous déhâler, Mains d'ange, En vous faisant saigner les doigts* ! |
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Arthur Rimbaud (1854 - 1891) |
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Portrait de Arthur Rimbaud | |||||||||
BiographieArthur Rimbaud est né à Charleville-Mézières (dans les Ardennes) le 20 octobre 1854. Sa mère, Vitalie Cuif, est une femme très autoritaire et son père, Frédéric Rimbaud, est militaire. En octobre 1862, Rimbaud entre à l'Institut Rossat, une école fréquentée par les enfants de la bourgeoisie de Charleville. En 1865, il entre au collège de Charleville et commence à écrire. En 1870, il se lie BibliographieLa bibliographie rimbaldienne est considérable. Pour la seule période 1869-1950, dans les 536 pages du premier volume de sa thèse le Mythe de Rimbaud (Genèse du mythe, Paris, Gallimard, 1954 ; rééd. 1968), Étiemblc dénombrait déjà 2 606 livres ou articles, en France ou ailleurs. Pour la période 1968-1990, Yoshimi Yam3guchi, dans un récent numéro « Rimbaud » de la revue japonaise lichiko (n 17, Tok Cronologie |
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